Auteur : Jean-Jacques Goldman
Compositeur : Jean-Jacques Goldman
Editée par : Editions J.R.G.
Version originale
Année : 1993
Interprétée par : Fredericks - Goldman - Jones
Distribuée par : Columbia / Sony Music
Année | Interprète | Support | Référence | Pochette |
2011 | Michael Jones | CD Celtic blues live | Puzzle Productions |
J'ai des idoles en solde, j'ai quelques saints à céder
Des vieux leaders en vrai toc, j'ai des gourous périmés
Pas mal de stars de rock en stock, ex-rebelles "jetsettisés"
J'ai quelques dieux en boutique, 2, 3 prophètes à brader
Des discours à prix modique, des langues en bois démodées
Même un président pathétique, cynique et boursoufflé
C'est le grand marché de l'histoire
C'est un vieux monde à oublier
Restent nos rêves et nos espoirs pour tout recommencer
Et puis rallumer la lumière
Briser l'obscurité
Balayer la poussière
Respirer, respirer
Et puis remonter les rivières
Persister et signer
Une autre vie, d'autres frontières
C'étaient nos slogans, nos idées, on n'a pas changé
J'ai des rusés, des malins, médiatiques et maquillés
Des charmants, des magiciens, pour les plus désemparés
Des spécialistes en lieux communs, suffisants initiés
J'ai des sondages discrets pour remplacer toute pensée
J'ai des mensonges-vérités, dès qu'ils passent à la télé
J'ai des marchands, des tapis, qui peuvent tout acheter
C'est le grand marché, c'est la foire
Nouveau monde "audimatisé"
Restent nos rêves et nos espoirs
Pour tout recommencer
Antoine de Caunes : Il y a quand même un des titres qui s'appelle "On n'a pas changé" où, on a vu le président tout à l'heure, il y a un président pathétique.
Jean-Jacques Goldman : Oui, c'est pas très original ce que je dis là. Il était un peu pathétique aussi, non ?
Antoine de Caunes : Vous y montrez une déception terrible.
Jean-Jacques Goldman : Je ne suis pas le seul, c'est pas une chose très originale. Il y a eu des élections qui l'ont montré quand même.
Nulle Part Ailleurs
Canal +, 24 novembre 1993
Jean-Luc Cambier : Dans le livre-CD "Rouge", tu t'en prends nommément à "Tapie, Fabius, Attali, la bande à Mitterrand... des tricheurs se revendiquant des Droits de l'Homme, de l'anti-racisme. Ces idéaux deviennent tricheries". Tu n'avais jamais été si violent et si précis.
Jean-Jacques Goldman : Des hommes politiques se sont fait élire sur ces idées. Et puis, quand ils ont eu accès au pouvoir, on les a retrouvés impliqués dans des délits d'initiés. Ce n'est pas rien, c'est quand même piller l'Etat pour s'enrichir personnellement. Autour de cette bande, il y a beaucoup trop d'hôtels particuliers à Paris, de yachts, de Rolls Royce, d'avions privés... Dans les "grands travaux" (l'Arche de la Défense, L'Opéra-Bastille, La Pyramide et le "Grand Louvre", la nouvelle bibliothèque nationale) , il y a bien sûr une volonté d'entrer dans l'Histoire mais cette ambition personnelle, on peut encore dire qu'elle profitera finalement à la France. Par contre, arroser ses proches et sa famille, protéger ses partisans, c'est incompatible avec l'altruisme et l'honnêteté des militants de base qui ont voté et travaillé pour eux. Ça ne me choquerait pas chez un homme politique de droite parce que lui n'a pas prétendu qu'on allait tout partager puisqu'on était tous frères et égaux. Venant de la gauche, c'est une terrible trahison.
Goldman à l'heure de ses vérités
Télémoustique, 1994
Jean-Luc Cambier : Tu as, à nouveau, la dent dure contre "les rocks stars en stock, ex-rebelles jet-settisés". Tu ne pardonnes décidément pas ce marketing de la rébellion.
Jean-Jacques Goldman : C'est une blessure toujours rouverte, une autre trahison. Je m'étonnais récemment de la forme physique des Guns'n Roses. Sur scène, Slash et Axel sont toujours torses nus et ce sont de vrais athlètes. Je me souviens de junkies comme Johnny Winter, Neil Young ou Keith Richards, ils ne ressemblaient pas à des sportifs. Et puis, j'ai appris par le réalisateur du clip "Rouge", qui a aussi travaillé avec eux, qu'ils ont des appareils de musculation jusque dans leurs chambres d'hôtel et qu'une fille est engagée uniquement pour préparer leur jus de carotte. Quand on sait que l'album s'appelle "Appetite for destruction", que le groupe est le chantre du "sexe, drogue, et rock 'n roll", que les kids vont croire que c'est la défonce qui leur donne cette énergie et ce corps, quand on sait que tout ça finit dans le jus de carotte et un mariage avec un mannequin, c'est du cynisme à l'odeur de vomi. Moi, je n'ai jamais été fasciné par ce mythe de l'autodestruction liée au rock et à l'adolescence. Mais j'étais honteux de ne pas en être, de tousser en fumant un joint, d'avoir peur des piqûres et de rentrer tôt le soir pour ne pas inquiéter mes parents.
Goldman à l'heure de ses vérités
Télémoustique, 1994
On n'a pas changé (?!)
Livret de Du New Morning au Zénith
Raphaël Toledano : En 1988, vous aviez soutenu Michel Rocard en l'interviewant dans Le Nouvel Observateur. Il y a eu ensuite cette chanson "On n'a pas changé" dans laquelle vous critiquiez Mitterrand, le traitiez de "président pathétique, cynique et boursouflé". Vous dites n'être pas très engagé, mais quand même...
Jean-Jacques Goldman : Oui. Mais je ne sais pas si c'est un engagement très fort d'avoir des sympathies sociales-démocrates et de ne pas se sentir proche de Roland Dumas ou de Bernard Tapie [rires] !
Rencontre avec Jean-Jacques Goldman
L'Arche n° 535, septembre 2002
Animateur : Dans une de vos chansons, "On n'a pas changé", vous parlez un petit peu de la télévision. Vous dites notamment que notre monde s'est audimatisé. Vous dites également que tout ce qui passe à la télévision devient vérité. Une petite attaque sur la télé qui passe bien. Jean-Jacques ?
Jean-Jacques Goldman : Ce n'est pas une attaque, c'est un constat, qu'on peut regretter, que je regrette, mais c'est vrai, on existe ou on meurt avec la télé. On a l'impression que rien ne peut exister, que cela soit sur le plan artistique, ou même des fois sur le plan des idées, sur le plan des œuvres. Je m'en rends compte avec des trucs comme les Restos du cœur et tout ça. La télé fait vivre et mourir un peu tout.
Animateur : Et ce qui vous gène là-dedans justement, c'est qu'elle prend justement de plus en plus de poids, c'est-à-dire qu'elle décide de ce qui doit vivre et de ce qui doit mourir.
Jean-Jacques Goldman : Elle décide, mais c'est juste un instrument, donc, c'est à nous d'essayer de l'utiliser. Mais c'est vrai que ça fait bizarre de savoir que si les gens qui s'occupent de la Bosnie savent l'utiliser, il va y avoir une mobilisation des gens sur la Bosnie et si les gens qui s'occupent de la Somalie ou du Cambodge à un moment n'ont plus les feux de l'actualité, les gens vont s'en désintéresser. Mais c'est comme ça, c'est un fait, il faut en tenir compte.
Journée spéciale Fredericks Goldman Jones
O'FM, 29 décembre 1993
Animateur : Il y a une chanson qui s'appelle "On n'a pas changé" qui est sur l'album, dans laquelle vous dites "J'ai un président pathétique, cynique et démodé" [sic] (...) Vous parlez de François Mitterrand ?
Jean-Jacques Goldman : (...) Il fait pitié cet homme là. ça doit être tragique à son âge de se rendre compte qu'on n'a pas été à la hauteur des espoirs qui étaient en lui. ça doit être très difficile à vivre, mais peut-être qu'il s'en fout.
Animateur : Pour vous, les deux septennats, c'est un échec.
Jean-Jacques Goldman : Je crois pour tout le monde, personne ne dit le contraire, même pas… enfin qui peut dire ça ?
Journée spéciale Fredericks Goldman Jones
O'FM, 29 décembre 1993