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Goldman, un homme juste
(L'Express, 25 Septembre 1997)

Goldman, un homme juste
L'Express, 25 Septembre 1997
Gilles Médioni

Goldman l'alchimiste. Tout ce qu'il touche se transforme en or. Après le succès planétaire de Céline Dion, il sort son propre album "En passant". Et parle à "L'express". De son métier, de politique et de lui.

Goldman un homme juste

Porteur de paroles à succès, l'homme en or revient avec "En passant". De nature peu bavarde, il fait une exception pour "L'express". Voyage en Goldmanie

Depuis 1981 Jean-Jacques Goldman, 46 ans, trois enfants, un pavillon à Montrouge, des tubes (II suffira d'un signe, Comme toi, etc.) des alliances (Johnny Hallyday, Céline Dion), des mains tendues (Les Restos du coeur), mêle aux cendres de l'Histoire les feux de la colère et le sang de l'espoir.

Après avoir planté le drapeau rouge (Rouge, le disque des utopies fanées, 1993), dernier chapitre en date des années Fredericks, Goldman et Jones, il livre "En passant", nouvel album solo, parcouru de ballades déchirantes (En passant) et de rock syncopé (Les Murailles).

La rupture, l'éphémère, les plaisirs minuscules forment le coeur de ce nouvel espace sans rature. Cet homme "simple, sensible et honnête" (selon les mots de Patricia Kaas), qui refuse les Unes "Pas par fausse modestie, je ne suis pas modeste, mais paraître en couverture me semble disproportionné par rapport au reste de l'actualité" - lève aujourd'hui ses défenses.

L'Express : Dans vos textes, on arpente des rues, des chemins, des routes. La pochette de votre dernier CD vous cadre sur l'asphalte. Etes-vous le passant d'En passant ?

Jean-Jacques Goldman : Oui. J'adore marcher. J'aime observer, je me nourris des autres. En flânant, je savoure le spectacle du monde,1e spectacle des gens, qui m'amène aux chansons. Par exemple, tout était dit après avoir croisé de belles inconnues à des terrasses de café. Contrairement au proverbe, je crois qu'il faut se fier aux apparences.

L'Express : De quelle façon a surgi "Juste quelques hommes", un titre qui martèle : " Au bout du mal, où tous les dieux nous quittent et nous abandonnent (...) / Juste quelques hommes / Quelques hommes justes " ?

Jean-Jacques Goldman : Sans doute une image qui m'a marqué, peut-être un reportage sur le Grand Nord à la télé. A l'extrême de l'extrême dans le Grand Nord, les grands fonds, les forêts les plus touffues, même dans l'espace, on trouve toujours des hommes. Et jusqu'"au bout du mal". Oui, même au bout de l'horreur, il y a toujours un prêtre, une mère, un médecin, une mère Teresa pour essuyer un corps.

L'Express : Parlez-nous de "Sache que je".

Jean-Jacques Goldman : J'ai répondu à une question : 'pourquoi ne dites-vous jamais "Je t'aime" dans vos chansons ?'

L'Express : Pourquoi ?

Jean-Jacques Goldman : Pas par manque d'amour, non. Parce qu'il y a du contrat dans ces trois mots là, une question aussi.

L'Express : Vous écrivez qu'"on ne ment qu'avec des mots".

Jean-Jacques Goldman : Les mots peuvent être la plus belle des réalités ou le pire des masques. Rocard dit : "Les faits sont têtus". Lorsque Kouchner lance aux infirmières : "Je ressens vos revendications dans mon coeur", c'est quoi ? Lorsque Michael Jackson répète "I love you, I love you", l'expression devient vide. J'ai du mal à dire "Je t'aime", dans la vie et dans mes disques.

L'Express : Après tous ces refrains pour Khaled, Johnny Hallyday, Patricia Kaas ou Céline Dion...

Jean-Jacques Goldman : Je n'en écris pas tant que ça. (Il compte sur ses doigts). Six ou sept titres par an !

L'Express : ... avez-vous enfin résolu cette énigme : qu'est-ce qu'une chanson réussie ?

Jean-Jacques Goldman : Un moment d'émotion. Une connivence partagée. Pour l'atteindre, ça va vous paraître ridicule, mais bon, il faut un équilibre entre les mots, les notes, les arrangements et l'interprète. "Foule sentimentale" chanté par un autre qu'Alain Souchon ne serait plus la même chanson.

L'Express : Comment vous définiriez-vous ?

Jean-Jacques Goldman : Je suis un chanteur français de variétés, plus proche d'Enrico Macias que de Morrissey ! Et il y a du mauvais chez Morrissey et du bon chez Macias. En fait, je me sens assez peu chanteur. Lorsque j'entre en studio, ou avant une émission télévisée, je suis obligé de retravailler ma voix. Malheureusement. Je suis très ému d'entendre mes chansons servies par de grandes voix : Hallyday entonnant "L'envie", Céline Dion, "La Mémoire d'Abraham", ou Khaled, "Aïcha", repris en choeur par 2 000 beurettes.

L'Express : Vous évoquez vos parents dans "Bonne Idée". Ont-ils été étonnés ?

Jean-Jacques Goldman : Leur plus grande fierté, c'est que je revendique leurs prénoms, Ruth et Moïshé, eux qui ont tellement voulu être français. "Rouge" était déjà un hommage à leurs idées, perverties par la gauche du (appelons ça pudiquement) deuxième septennat.

L'Express : Que vous ont appris Ruth et Moïshé ?

Jean-Jacques Goldman : Le sens des valeurs. L'amour de la France. Le fait que rien ne va jamais de soi. Ni se promener dans la rue librement, ni voter, ni aller à l'école gratuitement, ni avoir de quoi manger. Je suis essentiellement ce qu'ils étaient. Ce qu'ils m'ont inculqué.

L'Express : Vous ont-ils élevé dans la religion juive ?

Jean-Jacques Goldman : A la maison, la religion était "l'opium du peuple" ! Mais l'engagement politique n'est pas si éloigné de la religion.

L'Express : Une biographie [Jean-Paul Dollé, "L'insoumis, vies et légendes" de Pierre Goldman, Grasset (parution en octobre)] paraît bientôt sur Pierre, votre frère, un des révoltés de Mai 68, assassiné à 35 ans. Pierre est-il vibrant en vous ?

Jean-Jacques Goldman : Mon attachement est relatif. On avait six ans d'écart et j'étais encore un gamin lorsqu'il a quitté la maison. Pour nous, il ne peut être un mythe. J'avais une image de lui plus simple, plus entière, celle d'un grand frère. Il est devenu une figure révolutionnaire, c'est un fait, et j'y assiste comme vous. De toute façon, je vis assez peu avec le deuil. Pour moi, le problème reste la vie, pas la mort.

L'Express : Comment voyez-vous la France d'aujourd'hui ?

Jean-Jacques Goldman : C'est un vieux pays, assis sur une histoire, des réflexes, des conflits. Une nation qui ne connaît pas le consensus et agace, comme une femme agaçante dont on ne pourrait se passer. La France est aussi le pays le plus ouvert et le moins raciste du monde, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y ait pas de racisme. Pour que Goldman et Khaled, le juif et l'Arabe, travaillent ensemble, il fallait que tout le monde l'admette, et d'abord les communautés juive et musulmane.

L'Express : Accepteriez-vous une interview avec Lionel Jospin ?

Jean-Jacques Goldman : Lui refuserait, et il aurait raison. Jospin n'a besoin de personne. Lorsque j'ai interviewé Rocard pour Le Nouvel Observateur, cela me semblait un acte très antimitterrandiste. A l'époque, il y était question du pire : le dévoiement d'un espoir.

L'Express : François Mitterrand a-t-il réagi ?

Jean-Jacques Goldman : Non.

L'Express : Vous n'apportez jamais de jugements de valeur dans vos chansons ?

Jean-Jacques Goldman : Je suis plus habité par les doutes que par les certitudes. I1 y aura d'autres messies que moi !


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