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Le Journal des Spectacles
(Europe 1)

Le Journal des Spectacles
Europe 1
19 juin 1998

Merci à Corinne pour la retranscription de cet entretien.

Bruno Crasse : En compagnie de Jean-Jacques Goldman, que vous avez rencontré, vous avez eu le plaisir, le bonheur, j'ai presque envie de dire, de rencontrer parce qu'il est rare (...) Vous avez été dans sa loge juste avant son dernier concert au Zénith, donc c'était mardi soir.

Et puis tout ça c'est aussi à l'orée d'une grande tournée, parce qu'il part sur les routes, Jean-Jacques Goldman, à partir du mois d'août, c'est ca, Isabelle?

Isabelle Giordano : Oui, à partir du 3 août, il sera à Lyon, puis il va se balader à travers la France, alors tous ceux qui nous écoutent vont être servis, parce qu'il va vraiment se balader un peu partout : Rennes, Marseille, bien sur à Paris en octobre, en novembre. Une grande tournée, qui dure du mois d'août jusqu'au mois de décembre. Vous voyez quand il décide de faire des tournées, c'est vraiment quelque chose et c'est vrai que cette tournée, qui vient quelque mois après la sortie de cet album solo, premier album solo depuis 9 ans quand même, puisqu'à chaque fois il était très accompagné par quelques autres chanteurs et puis...

Bruno Crasse : Il s'est vendu à combien cet album ?

Isabelle Giordano : un album qui s'est très bien vendu, qui est sorti à l'automne "En passant", chez Sony. C'est vrai que les tournées de Jean-Jacques Goldman sont toujours intéressantes puisqu'il y a une année, il avait fait une tournée des campagnes. Il s'était dit qu'il allait voir ces petits villages ou il y a jamais de concerts, il y a même pas de salle de concerts et c'était vraiment quelque chose d'exceptionnel puisque les billets se vendaient vraiment dans les bars -tabacs. Il allait dans des villages où il n'y avait même pas 300 habitants. C'est vrai que c'est quelqu'un qui vraiment apporte un soin particulier à ses tournées.

Bruno Crasse : Il fait toujours le plein, aujourd'hui Goldman ?

Isabelle Giordano : Oui, oui, vraiment. Et c'est vrai, que c'est un privilège aussi de le rencontrer comme ça dans sa loge, même pas une heure avant le début du concert.

Bruno Crasse : Comment ça c'est passé, est-ce qu'il n'avait pas le trac d'abord, parce que toute l'interview s'est passée juste avant 20 h 30, avant le début du concert ?

Isabelle Giordano : Oui, alors voilà, on pénètre dans une grande salle ou il y a toute une série de personnes qui sont à table. Il s'agit de l'équipe, des musiciens, etc. Donc c'est quand même très bon enfant. Et puis, on pénètre dans une loge qui est plutôt confortable, sans être luxueuse, il y a écrit son nom sur la porte et il est là, on sent qu'il est en train de se concentrer. Il y a juste quelques biscuits, quelques verres de jus d'orange, de Coça Cola etc. et puis au fur et à mesure de l'interview, on sentait que le stress quand même montait, donc je n'ai malheureusement pas fait une interview trop trop longue.

Bruno Crasse : Alors justement, il n'aime pas trop les interviews.

Isabelle Giordano : Voilà, le privilège, c'est de rentrer dans l'univers d'un homme qui donne très peu d'interviews, qui est très rare, très secret, qui est même un peu introverti, qui n'aime pas, il le dit, il n'aime pas les interviews, il aime pas parler, tout est dans sa musique, il exprime tout dans ses chansons. Donc c'est vrai que c'est quand même agréable de rencontrer un des chanteurs aujourd'hui les plus populaires en France.

(...)

Bruno Crasse : En compagnie de Jean-Jacques Goldman, que vous avez rencontré, Isabelle Giordano à travers sa série de concerts qui se sont terminé mardi au Zénith. Et puis à l'occasion d'une tournée qui débute au mois d'août et qui dure jusqu'en décembre. Alors, on est mardi soir, il est 19 h 30 et vous êtes dans la loge de Jean-Jacques Goldman.

Isabelle Giordano : Et imaginez la silhouette de cet homme un peu frêle qui va arriver sur la scène devant 5 à 6000 personnes, lui qui quand même assez timide et introverti. Quel effet ça peut bien faire d'arriver comme ça sur une grande scène avec un public qui est très varié, ça va des gamins de 10/12 ans aux gens de plutôt 40/45 ans puisque lui-même a déjà dépassé la quarantaine. C'est vrai que, je me suis demandé comment ce Jean-Jacques Goldman, qui a quand même eu une éducation très rigoriste avec des parents nés dans les pays de L'est, une éducation comme ça de communistes. Il raconte souvent que chez lui on écoutait les chœurs de l'armée rouge, lui-même on l'a forcé à faire du violon, etc. Le jour où il a fait son premier Olympia, il s'est lui-même auto censuré, il s'est interdit d'inviter sa famille. Parce qu'il avait une honte vis à vis de son père, qui était un homme ancien résistant et aujourd'hui, ben voilà, il fait des concerts et en a plus honte alors je lui ai demandé quel genre de plaisir il éprouvait, comme ça devant une salle.

Jean-Jacques Goldman : Il y a d'abord le plaisir de concevoir le spectacle, donc toute la préparation avec les musiciens d'abord, avec les gens des films, avec les gens des lumières, avec ceux de la scène. Et ensuite, la vie de tournée, elle-même. Un genre de vie post-adolescente.

Isabelle Giordano : Ça ressemble à quoi, c'est une vie de nomade ?

Jean-Jacques Goldman : Ça ressemble à rien, c'est une vie extrêmement artificielle, très préservée, une vie d'hôtels, de route, extrêmement futile, quoi !

Isabelle Giordano : Il y a quelques années, vous aviez fait une tournée en campagne, c'est à dire plutôt dans des petites villes. Est-ce que vous pouvez expliquer aux auditeurs ce que vous avez voulu faire dans cette démarche ? Et la raison pour laquelle vous l'avez fait ?

Jean-Jacques Goldman : En fait, c'est un retour au source, on a tous commencé en tant que musicien, à jouer dans des petits villages dans des petites villes, pour faire des bals. Et ça faisait une dizaine d'année qu'on était arrivé à ce qu'on souhaitait quand on faisait des bals, c'est à dire de jouer dans des grandes salles. Et on a eu l'envie, j'étais avec Carole et Michael, on était encore en trio de retrouver cette ambiance de toute petite salle. Et tant qu'à faire des petites salles, autant ne pas les faire dans des grandes villes mais les faire dans des villages ou il n'y a jamais de spectacle. C'était ça l'idée, de retrouver cette espèce de.. en même temps d'intimité et en même temps d'innocence des spectateurs.

Isabelle Giordano : Et vous qu'on connaît plutôt timide, introverti, est ce que c'est une forme d'épreuve pour vous de vous retrouver comme ça sur une grande scène du Zénith ?

Jean-Jacques Goldman : Ça l'est de moins en moins, essentiellement parce je suis de moins en moins présent, il s'agit jamais de tour de chant, il s'agit vraiment de spectacle. Donc quand j'arrive je sais que je vais un des éléments, important, je sais, mais un des éléments du spectacle. Je sais qu'à un moment je vais commencer à faire ça et que là, c'est le film qui prend le pas, qu'à certains moments, bon ben je vais faire ça et que c'est un des musiciens qui prend le pas etc. Et çà, c'est beaucoup moins contraignant.

Isabelle Giordano : Est-ce qu'il y a encore des choses qui vous font peur, quand vous êtes comme ça sur une scène, devant des milliers de personnes ?

Jean-Jacques Goldman : Il y a une seule chose, enfin deux choses qui sont un peu les mêmes, ce sont les pannes. Alors donc, il y a la panne physique : le fait d'être malade et la panne technique, celle qui arrive presque tous les soirs, c'est à dire à un moment, un des trucs qui marche pas.

Isabelle Giordano : Récemment, vous avez exprimé dans une interview votre peur de tourner en rond, aujourd'hui, qu'est ce qui vous inspire, qu'est ce qui vous influence ? musicalement, bien sûr.

Jean-Jacques Goldman : Musicalement, pas grand chose très sincèrement, donc je tourne en rond déjà. Ce qui me rassure, c'est que tout le monde tourne en rond à partir de 40 ans à peu près, je vois pas beaucoup d'exemple de chanteurs qui aient absolument changé de référence, par exemple, et qui font des choses absolument inattendues, ça j'en connaîs pas des masses donc l'inspiration reste toujours la vie, l'appétit des autres, l'appétit de voyeur que nous avons tous.

Isabelle Giordano : "Sache que je", la célèbre chanson, est-ce qu'on peut savoir à qui elle s'adresse ?

Jean-Jacques Goldman : Mais elle s'adresse pas à quelqu'un, ah oui, si, elle s'adresse à quelqu'un, oui.. Je sais pas, j'ai pas réfléchi à ça ! Elle s'adresse aux personnes à qui je suis susceptible de le dire. Donc je préviens d'avance que je ne le dirais pas. Mais en fait, le thème de la chanson, c'est pas vraiment ça, le thème c'est : est-ce qu'on peut dire qu'on est amoureux de quelqu'un avec les mots "je t'aime". C'est ça la question. A mon avis, non, parce que les mots sont plus... je crois que si je disais ça, ça ferait éclater de rire. Mais donc le sentiment est là, les mots sont plus là pour le dire. Je dirais donc "sache que je", mais je sais pas à qui!

Isabelle Giordano : Est-ce que vous avez l'impression de devoir quelque chose à vos parents, musicalement ou dans d'autres domaines. Vous vous sentez redevable de quelque chose.

Jean-Jacques Goldman : Immensément, exclusivement, totalement même pathologiquement aussi. J'arrive à peine à 45 ans à me dire mais ça va vous faire sourire car je suis sûr que vous avez beaucoup réfléchi à ca, comme n'importe quelle femme en particulier, de se dire, tiens je fais un acte qui n'a pas été programmé pour que je le fasse, quoi ! C'est tout de même terrassant, quand on arrive même à mon âge de se dire, tout ce que j'ai fait, je l'ai quasiment pas choisi, je n'ai fait que ce qu'on a programmé pour que je le fasse. Cette phrase est à mon avis pas tout à fait correcte mais elle est compréhensible. Voilà, donc on leur doit tout et en même temps, et on leur doit aussi d'être si peu ce que nous aurions pu être.

Isabelle Giordano : Est ce qu'aujourd'hui, vos sources de bonheur, de plaisir sont très différentes de celles que vous aviez à 20 ans ?

Jean-Jacques Goldman : Non, non non , non je crois qu'on ne change pas beaucoup. En gros, on ne change pas, d'ailleurs il y a une chanson dans le prochain album de Céline qui s'appelle comme ca, qui dit ça : en fait on change pas.

Isabelle Giordano : Vous, vous n'avez pas changé depuis Tai Phong, quand même

Jean-Jacques Goldman : Pas tellement non, enfin en dehors de mes cheveux et d'autres détails, mais je pense qu'on change pas, on reste fondamentalement le même que celui de la photo du CM2, quand on regarde, on se souvient les peurs qu'on avait, les enthousiasmes qu'on avait, le caractère qu'on avait même, moi je vois très peu de gens qui ont vraiment changé par rapport à cette photo du CM2.

Isabelle Giordano : Même avec les épreuves de la vie, les souffrances, les cicatrices ?

Jean-Jacques Goldman : On apprend les choses, mais on ne change pas, on a toujours les mêmes timidités, le même manque de timidité pour d'autres, j'ai pas l'impression qu'on change tant que ça.

Isabelle Giordano : On creuse un sillon ?

Jean-Jacques Goldman : On fait ce qu'on peut quoi ! Mais on est très très pré-programmé au départ.

Isabelle Giordano : Et les sources de bonheur, donc en dehors de la musique, il paraît que vous aimez le poulet aux herbes de Provence, c'est ça ?

Jean-Jacques Goldman : Moi, j'aime tout, moi j'aime tout tout. J'aime bien me réveiller, je trouve que c'est déjà un coup de pot. J'aime tout, alors là... Hier, j'étais avec des amis et j'étais en train de prendre une douche après, j'avais fait du tennis, tout ca, je me demandais si je ne vivais pas que pour prendre des douches. Parce que c'est quand même un moment extraordinaire. Non mais tout tout est bon à prendre, quoi !

Isabelle Giordano : Quand vous étiez scout, on vous appelait chat sauvage, arrogant et décidé. Alors chat sauvage pour vous , on comprend bien mais arrogant et décidé, on a du mal à l'imaginer...

Jean-Jacques Goldman : C'était une grande surprise pour moi, une grand surprise puisque c'est des gens qui me connaissaient extrêmement bien. Moi, je me vivais pas du tout comme ça. Probablement qu'on dégage des choses sans le savoir, on les dégage à l'extérieur mais c'est pas forcément conscient. Mais cette histoire d'arrogance, on me l'a dit après très souvent, c'est pas une volonté d'être méprisant, pas du tout et c'était peut être une distance, et c'était une surprise pour moi mais c'est probablement vrai, on ne se juge pas soi même, on est jugé par les autres.

(...)

Isabelle Giordano : Est-ce que vous vous comparez à Leonard Cohen, qui s'est retiré dans un monastère, est-ce que c'est une idée qui vous a effleuré un jour ou l'autre ?

Jean-Jacques Goldman : Dans un monastère, non parce que j'ai l'impression que j'ai pas besoin des rigidités extérieures, comme de tuteurs, pour tenir debout. Mais je pense que le vieillissement mène tout à fait vers une situation d'une partie de la vie plus recluse et une autre partie plus créatrice qui va aller en diminuant. Mais, ce côté Jean Ferrat dans son village, je donne ses références pas parce que je me sens concerné mais parce qu'elle sont connues de tout le monde, je ne me compare pas du tout. Où Jacques Brel dans ses Marquises, je pense que c'est une évidence. On se retire un jour dans un vieux jardin, avec quelques proches et puis la partie publique diminue au fur et à mesure.

Isabelle Giordano : Vous envisagez les années à venir de cette manière ?

Jean-Jacques Goldman : Oui, avec beaucoup d'enthousiasme d'ailleurs.

Isabelle Giordano : Vous pensez qu'il y a une forme de vie que vous n'êtes plus prêts à vivre ? Des concessions que vous n'avez plus envie de faire ?

Jean-Jacques Goldman : Des emplois du temps, on va dire. Et puis surtout plein de choses qui sont passionnantes et que l'on a pas le temps de faire quand on est dans l'hyper activité. Ne serait-ce que le monde de la lecture qui est infini et qui m'attire beaucoup.

Isabelle Giordano : Comment on se sent une heure avant un concert ?

Jean-Jacques Goldman : Très détendu, là et puis ça commence à monter, bon parce que je suis habitué quand même, un quart d'heure avant ça commence à monter. Et juste avant, on commence à être dans un état vraiment hyper concentré mais jamais apeuré.

Isabelle Giordano : Et le trac se manifeste comment ?

Jean-Jacques Goldman : Non non, j'ai plus le trac. Je l'ai eu terriblement au début, même il fallait prendre des médicaments, c'est vrai que maintenant, après plusieurs centaines de concerts, en plus ce sont des concerts très faciles, dans le sens où les gens sont vraiment bienveillants donc il n'y a pas de raisons d'avoir le trac.

Isabelle Giordano : Est-ce que la révolte tranquille, c'est un terme qui pourrait vous définir ?

Jean-Jacques Goldman : Révolte, non, j'ai pas l'impression d'être tellement révolté, non et puis j'ai aucune raison d'être révolté. J'ai toujours été très chanceux.

Isabelle Giordano : Pourtant dans les paroles de vos chansons, il y a des choses que vous dénoncez.

Jean-Jacques Goldman : Oui, mais enfin, les paroles sont des mots, la rebellion, la révolte, c'est plus dans les actes que dans les mots, c'est facile dans les mots.

Isabelle Giordano : Et que pensent vos enfants de votre musique ?

Jean-Jacques Goldman : Oh, ils sont indulgents, c'est une musique qui les concernent pas. Puisqu'ils sont dans ce qu'on écoute maintenant, plutôt la techno, le rap... Mais ils n'ont pas honte je crois. Ils viennent au concert de temps en temps. Enfin, bon, ils écoutent pas ça chez eux ou alors en douce.

Isabelle Giordano : Et vous, la techno, le rap, vous en pensez quoi ?

Jean-Jacques Goldman : Ce sont des musiques de danse, essentiellement, il y en a toujours eu et c'est très bien. Peut être ça va déboucher sur autre chose. Quelqu'un m'avait dit que c'est le retour de la chanson à texte, le rap. Il y a certainement des beaux textes qui vont venir.

Isabelle Giordano : Comment vous imaginez vous dans 10 ans ?

Jean-Jacques Goldman : Dans le sud Ouest, je pense.

Isabelle Giordano : Toujours en train d'écrire de la musique ?

Jean-Jacques Goldman : Je sais pas, ça dépendra de l'envie, j'en aurais plus besoin, je souhaite en avoir encore besoin sur le plan personnel mais bon, faut souhaiter que l'envie perdure.


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