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Les obsèques de Pierre Goldman, une émotion contenue
Le Monde, 29 septembre 1979
Article de Philippe Boggio
Retranscription de Linda Delozier

Près de douze mille personnes ont assisté, jeudi 27 septembre, en fin d'après-midi aux obsèques de Pierre Goldman et à son inhumation provisoire au cimetière du Père-Lachaise (20ème). Ils s'étaient retrouvés, vers 16 h, devant l'institut médico-légal, quai de la Rapée (12ème), pour la levée du corps, et ont suivi, en une marche silencieuse, le cercueil du militant assassiné le 20 septembre. Un bref incident a opposé, après les obsèques, les forces de l'ordre à un groupe d'"autonomes". Huit jeunes gens ont été interpellés. Six d'entre eux ont été déférés au parquet.

Pierre Goldman aurait-il aimé ses obsèques ? Sans doute y aurait-il trouvé certaines correspondances avec les multiples facettes de sa personnalité, avec les portraits successifs de son propre personnage. Pour saluer sa mémoire, jeudi après-midi, la rue rassemblait des "antifascistes" de tous âges, des militants, des juifs polonais nés en France, des écrivains, des révolutionnaires, des musiciens sud-américains et quelques voyous.

La foule recomposait les images du mort, ainsi que les étapes de Pierre Goldman dans l'"avant et l'après-Mai 68", ce siècle de quelques années. Une sorte de rétrospective des causes diverses qu'avait défendues le militant assassiné, joué par des acteurs qui lui ressemblaient un peu. La famille et les proches de Pierre Goldman ayant demandé aux Parisiens de venir "sans banderoles ni drapeaux", les participants s'étaient rassemblés sans les habituels signes de ralliement des manifestations de la gauche, devant l'immeuble de l'institut médico-légal.

Une émotion contenue : un métissage d'origines et d'histoires politiques, avec, à mesure que le cortège se rapprochait du Père-Lachaise, une foule de plus en plus nombreuse d'hommes et de femmes de l'âge de Pierre Goldman. Des blousons de cuir noir, ce signe de reconnaissance devenu sans objet, mais aussi des écharpes noires jetées à la hâte sur des costumes de ville. L'extrême gauche était là, avec ses jeunes militants d'aujourd'hui, ses membres d'honneur à vie, avec ceux qui avaient versé dans le journalisme et celles qui avaient fondé le féminisme.

Beaucoup se retrouvaient après une longue absence, mêlant le rire aux larmes. Beaucoup se trouvaient vieillis, à voir les rides sur les visages d'anciens compagnons de route. Les membres de l'équipe de Libération se serraient les uns contre les autres. Yves Montand et Simone Signoret firent une apparition. Jean-Paul Sartre éprouvait des difficultés à marcher.

Tout au long du cortège, le silence fut leur seul mot d'ordre. Au cimetière, on se pressa à suffoquer, prés de la tombe de Pierre Goldman. Les photographes firent leur métier. Des militants critiquèrent ce métier.

Il ne devait rien se passer d'autre. L'émotion ne pouvait plus naître d'aucune évocation : forcer la comparaison, comme certains ont tenté de le faire près de la tombe de Pierre Goldman ente les obsèques de ce mort de 1979 et l'enterrement, sept ans plus tôt, du militant maoïste Pierre Overney, frisait le dérisoire.

Des filles jetèrent des fleurs dans la fosse. Des juifs en calotte lancèrent quelques cailloux sur le cercueil. Il y eut encore des larmes et des bousculades. Jean-Paul Sartre fut victime d'un malaise. Des musiciens antillais, les derniers amis de Pierre Goldman, frappèrent sur leurs bongos, mais leur musique ne parvint pas à ranimer la magie de ce cimetière, hanté par l'écho de l'Internationale.

Il ne devait se passer rien d'autre. Sinon une rupture du ban : le flot des arrivants se sentait pressé vers la sortie, située 30 mètres après la tombe fleurie, promis à une dissolution rapide, presque une dilution dans les rues de Paris.

Sans raison apparente les forces de l'ordre s'avancèrent sur le boulevard dix minutes plus tard : il n'y avait personne en face d'elles, à peine la traditionnelle poignée d'"autonomes" de service…

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