Pourtant, j'étais dans la foule, jeudi. Ce matin, le jour après l'enterrement, comme tous les jours, après que Pierre se soit fait descendre, je me réveille en pensant à lui. Je me demande pourquoi ? Qu'est-ce qu'il y a avec cette mort qui me dérange ? Ce n'est pas la première fois que je suis touché par la mort de quelqu'un que j'ai connu. Je cherche. Alors, je suis retourné au Père Lachaise, instinctivement, sans analyser mon geste : je cherche à comprendre, c'est tout.
Je m'arrête à l'entrée et je demande au gardien où se trouve le tombeau de Pierre Goldman, même si je sais, j'ai envie de voir sa réaction. Il est respectueux. "9ème division, Monsieur, vous montez les marches, c'est le caveau dépositoire de la ville de Paris, vous verrez toutes les fleurs". Il restera combien de temps dans le caveau ? "Je ne sais rien Monsieur". "A qui il faut demander ?" "Je n'en sais rien, Monsieur, la police peut-être ?".
Je me trouve seul devant le caveau, seul avec une mémoire, avec des fleurs, "à mon fils", "à mon époux, à mon père", "des Arméniens", "Sans Frontière", "MRAP", des bouquets sans étiquette, un bouquet entouré d'un foulard orange... Des fleurs par terre, déjà fanées. Je ne sais pas quoi penser, je pleure et puis je me dis "Ils étaient trois pour descendre Pierre. Il fallait trois fachos armés pour l'assassiner. Ils ont eu vraiment peur de lui et je sais ce qu'il représente". Je sors du Père Lachaise. Sur le mur "Du Rock pour faire danser les morts", signé Diesel. Pierre aurait aimé ça. Ils ont eu vraiment peur de Pierre mais ils ont oublié une chose : Pierre n'était pas seul.
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