Auteur : Jean-Jacques Goldman
Compositeur : Jean-Jacques Goldman
Editée par : J.R.G. / N.E.F. Marc Lumbroso
Version originale
Année : 1987
Interprétée par : Jean-Jacques Goldman
Distribuée par : C.B.S.
Tu parles, parles, c'est facile, même sans y penser
Les mots, les mots sont immobiles, triés, rangés, classés
Laisse aller, laisse-les jouer
Se cogner, te séduire
"Sensualiser", te bouger
Quand ça veut plus rien dire
Swinguer les mots, les mots, sans ça
On va les rétrécir
Swinguer les mots, ne surtout pas
Toujours les réfléchir
Les mots, l'émo, l'émotion vient
Les mots font l'émotion
Coûte que coûte, écoute-les bien
Rythmer nos déraisons
Les sons, les sons, laissons-les rire
Faut pas les écouter
Juste pour éviter le pire
On va les déchaîner
A quoi tu sers ? Pourquoi t'es là ?
Qu'est-ce que t'espères ? A quoi tu crois ?
Y'en a qui meurent, qui prient pour un morceau de terre
Y'en a qui risquent leur vie pour passer la frontière
Y'en a qui bronzent et d'autres qui s'font la peau plus claire
Certains s'effraient au fond quand d'autres font des affaires
Mais y'a toujours la lune qui s'méfie du soleil
Et quand tout ça changera, c'est pas demain la veille
Certains smatchent ou labourent, d'autres soignent ou bien peignent
C'est à toi, c'est ton tour, qu'est-ce que t'as dans les veines ?
A quoi tu sers ? Pourquoi t'es fait ?
Terminus Terre, un seul ticket
Y'en a qui grimpent en l'air pour un peu plus d'silence
Y'en a qui vivent sous terre où ça hurle, où ça danse
Y'en a qui pointent les comptes quand d'autres comptent les points
Y'en a qui lèvent des croix pour ceux qui n'y croient pas
Y'en a qui pincent des cordes, y'en a qui frappent des peaux
Certains "import exportent", ou bien se jouent des mots
Y'en a qui s'font des billes quand d'autres tombent les filles
Certains ne donnent qu'aux hommes, mais autres n'aiment personne
Mais y'a toujours la lune qui s'méfie du soleil
Et quand tout ça changera, c'est pas demain la veille
Y'en a qui courent une vie pour gagner deux dixièmes
A présent, c'est ton tour, qu'est-ce que tu nous amènes ?
A quoi tu sers ? Pourquoi t'es fait ?
T'as la lumière, et puis après ?
Graffiti : Alors, si nous décortiquions maintenant les textes un par un avec tout d'abord le titre ouverture "A quoi tu sers ?", une chanson inscrite à mort dans la tradition goldmanienne, plutôt pessimiste et "rentre dedans". Après tout pourquoi faut-il servir à quelque chose ?
Jean-Jacques Goldman : Je crois que tout le monde se pose un jour ou l'autre la question de savoir "à quoi il sert", chacun de nous possède en lui une capacité, nous sommes nés pour accomplir des choses. Certains sont nés pour ne rien faire éventuellement aussi mais je pense, qu'à partir d'un certain âge, immanquablement, on se retrouve confronté au problème du pourquoi de sa vie et il s'agit, pour nous, de lui donner un sens.
Graffiti : Le mot "servir" me gêne un peu. Doit-on forcément "concevoir utile" ?
Jean-Jacques Goldman : Non, mais c'est un acte égoïste que de vouloir se réaliser à travers les autres notamment pour les artistes qui se nourrissent de la vie des gens pour créer. Ce que je veux dire, c'est que la question qu'on se pose "qu'est-ce que je fais de ma vie" est liée complètement au caractère utile de "A quoi tu sers ?".
Graffiti : "Terminus ticket terre", une phrase qui ne permet pas de se repasser le film a l'envers ?
Jean-Jacques Goldman : Eh oui, c'est comme ça, est-ce qu'il y a quelque chose après, ça on n'en sait rien, en tout cas, il n'existe pas de ticket pour là-bas.
Graffiti, 1987