Auteur : Jean-Jacques Goldman
Compositeur : Jean-Jacques Goldman
Editée par : BMG Music Publishing France
Version originale
Année : 1982
Interprétée par : Jean-Jacques Goldman
Distribuée par : CBS
Hey bonsoir Mr. Blues, bonsoir Mr. Cafard
Bonsoir vielle compagne Mrs. araignée noire
J'vous avais pas sonné, j'préfère pas trop vous voir
Mais puisque vous êtes là, vous pouvez vous asseoir
On va se faire une fête rien qu'entre vous et moi
Nous arranger la tête les grands dans les petits plats
Puisque mes sentiments sont en panne de moteur
Puisque je ne sais plus où, pourquoi, à quelle heure
Moi, j'ai quelques amis qui me laissent jamais tomber
En liquide, en pilule, en poudre, en comprimé
Les seuls à pouvoir encore me faire ressentir
Des morceaux d'émotion, des bouffées de plaisir
Une rose pour la vie
Une rouge pour l'amour
Une noire pour la nuit
Et une bleue pour le jour
Une jaune pour être speed
Une mauve pour être cool
Orange pour le rire
Et marron pour les moules
Une blanche pour être bien
Une verte pour la route
Et Jeanine, Jeanine, Jeanine pour éviter le pire
Quand les fêtes de la chandeleur sont bien terminées
Qu'il ne reste plus un roi, plus une reine à tirer
Quand j'ai tout à l'envers, que j'tiens plus la route
Quand il n'y a plus de mystère et plus l'ombre d'un doute
J'ai toute une panoplie rangée dans un placard
Superinsecticide spécial anti-cafard
Ne laissez pas vos sens dans les mains du hasard
Au gré de vos amours, des retours, des départs
Quand p'tit papa Noël pas descendu du ciel
Quand seul dans ton dodo, plus de petit cadeau
Décide donc toi-même d'être bien, d'être mal
Le bonheur en couleur sécurité sociale
Une rose pour la vie
Une rouge pour l'amour
Une noire pour la nuit
Et une bleue pour le jour
Une jaune pour être speed
Une mauve pour être cool
Orange pour le rire
Et marron pour les moules
Une blanche pour être bien
Une verte pour la route
Et Jeanine, Jeanine, Jeanine pour éviter le pire
Maxime Chavanne : Tu fais quand même le point sur certaines choses...
Jean-Jacques Goldman : Ce sont surtout des réminiscences. Et surtout de futures chansons de scène. Des trucs comme "Minoritaire" ou "Jeanine médicament blues", tu veux dire ? Elles passent inaperçues maintenant, mais ce sont des chansons très très utiles.
Goldman joue et gagne
Ok Magazine, 1984
Jean-Jacques Goldman : On peut parler de l'époque plus globalement, une époque qui nie et qui refuse la douleur, l'échec, l'effort. Je vais à la pharmacie ce matin, il y a sur le comptoir deux nouveaux produits qui marchent très bien pour la période des examens. Un truc qui vous excite un peu dans la journée et un truc qui vous fait bien dormir le soir. Autrement dit : comment avoir des examens facilement grâce à des pilules ! Moi je pense que la chose la plus significative aujourd'hui, c'est le Prozac. Il consiste à se dire qu'être malheureux c'est une pathologie, être stressé c'est une pathologie. Se dire que tout ça, c'est "inhumain", quoi. Ce sont des choses qui deviennent inacceptables. Quelqu'un est malheureux parce qu'il a perdu son travail ou parce que son petit copain l'a abandonné, ou parce qu'il a loupé son permis de conduire et il va prendre une pilule pour pouvoir survivre à ça. C'est vraiment une caractéristique de cette époque : "Je ne peux pas m'en tirer sans médication. Je ne peux pas compter sur moi". (...) Moi, ce qui me fait peur, c'est de tout vivre a minima. Quand vous prenez des calmants, effectivement les grosses émotions vous ne les avez pas en négatif, mais vous ne les avez pas non plus en positif. C'est une baisse générale de la libido, c'est une baisse des sensations. C'est ça que je trouve tragique !
Les pères ont des enfants
Seuil, novembre 1999
Jean-Jacques Goldman : Ce n'est pas le manque de courage uniquement, mais c'est considérer ce qui est dans notre nature comme insupportable. Je dis que le désespoir est supportable, qu'il fait même partie de nous. Je trouve que la douleur est supportable, que le dépit amoureux est supportable, je trouve qu'il est normal. Je plains les gens qui ne sont jamais allés au fond, qui n'ont jamais été désespérés. Alors pourquoi ? Ce n'est pas par masochisme ! C'est simplement pour que lorsque le soleil arrive, on puisse en jouir comme il le mérite. En gros, c'est la chanson anti-Prozac. Pour moi, le Prozac est inhumain puisque c'est une façon d'écrêter les bas, et d'écrêter aussi les hauts. Mais c'est quelle vie ? C'est une vie de racine... Une vie de quoi ? Même pas de mante religieuse, ou de rat ! Une vie de plante, je suppose... Je trouve que c'est dommage. Il faut accepter d'aller au fond juste pour le bonheur de savoir lorsque l'on est en haut.
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Option Musique, du 17 au 21 décembre 2001