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Jean-Jacques Goldman : “L’ambition, pour quoi faire ?”
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Jean-Jacques Goldman : “L’ambition, pour quoi faire ?”
?, avril 1984
Dany Chardin
Retranscription d’Hélène Bury
“Pourquoi chantez-vous ?” La réponse est toujours la même : “C’est une vocation. Tout petit, déjà, j’en rêvais”. Jean- Jacques Goldman qui se maintient depuis plus d’un an aux premières places des hit-parades (“Comme toi”, “Au bout de mes rêves”, “Envole-moi”) n’allait pas échapper à la sacro- sainte règle d’or des nouvelles vedettes. Un conte de fées. Encore un qui avait dû trimer dur pendant des années avant de connaître la douce chaleur des projecteurs. Encore…
Encore rien ! Jean-Jacques Goldman chante comme à une époque il vendait des raquettes de tennis dans le magasin de sport de ses parents en banlieue parisienne. Seule différence : aujourd’hui, il a trouvé une place de chanteur. C’est plutôt bien payé. Il y reste.
Serait-il malade ou menteur ? “Pas du tout, explique-t-il. C’est de naissance ! J’ai toujours été comme ça. Sans envies, sans ambitions, sans espoirs.”
En 1951, le petit Jean-Jacques pousse ses premiers cris. Ses parents ne sont ni riches, ni pauvres. Il suit ses études sans y porter grand intérêt, prend des leçons de piano, “comme tout le monde”, approche même le violon et Vivaldi, passe son certificat d’études “parce que c’était la mode”, et rentre tous les soirs à l’heure pour dîner. En 1964, il a treize ans. Autour de lui, on s’étonne. Jean- Jacques ne fait preuve d’aucune turbulence. Il est un adolescent trop sage. Pas la moindre fugue ou révolte. Pas un seul vol de mobylette. L’alcool ? Ne sait pas ce que c’est. Les cigarettes ! Quelle horreur ! Ça fait tousser. Les autres portent des blousons noirs et rêvent de devenir Hallyday ou Mitchell. Jean-Jacques Goldman, lui, ne fait aucun rêve. Il deviendra ce que le destin voudra bien lui réserver. Quant à sa tenue vestimentaire, pour rester enfermé dans sa solitude et même dans un certain mutisme, elle n’a pas grande importance. Aussi adopte-t-il la formule la plus simple : chemise, jeans, baskets.
1984. Jean-Jacques est devenu l’une des vedettes numéro un de la chanson française. Récompensé par plusieurs disques d’or, reçu à bras ouverts dans toutes les soirées mondaines où il daigne se déplacer, il est en passe de devenir une star du show-biz. Mais rien n’a changé. “J’ai seulement ajouté une veste à ma tenue, pour passer partout, et une cravate, pour faire bien !” En fait, les années n’ont en rien atténué le lymphatisme dont il faisait preuve enfant. Et pour cause ! “La chanson, ce n’est pas mon truc. Je n’ai jamais voulu être chanteur. Je voulais juste faire un peu de musique, c’est tout. J’aime bien gratter ma guitare ou pianoter, et faire naître, comme ça, par hasard, une mélodie. La seule chose que j’aime dans ce nouveau métier, c’est la création. La nuit, parfois, je me réveille, avec une idée de musique. Je me lève et je note. Mais le disque, c’est autre chose. C’est la fin de mon “travail”. Alors la scène ! C’est seulement une obligation pour faire vendre le disque. J’en ai peur”. Cette scène sur laquelle il se retrouve depuis le 29 février et jusqu’au 29 mai avec au programme une semaine à l’Olympia du 26 mars au 1er avril. Son premier Olympia.
Son succès d’aujourd’hui l’étonne encore. Il a été si soudain. Même si cela fait sept ans qu’il navigue dans le métier. “Après avoir passé mon bac et supporté H.E.C. (Hautes études commerciales) pendant trois ans, le temps d’obtenir mon diplôme, j’ai créé avec deux copains vietnamiens le groupe Taï Phong. On a sorti un tube “Sister Jane”, puis deux autres albums sans grand succès. En 1980, le groupe faisait ses adieux. Impossible de placer mes chansons. Et puis, un jour, une copine qui devait passer une audition m’a demandé de lui composer quelque chose. Ça a été le déclic.
Chanteur par obligation
La chanson a plu au jury, plus que la copine. Quelque temps plus tard, on me téléphonait pour m’en demander d’autres. Seule condition : je devais les chanter. C’est ainsi que je suis devenu chanteur par obligation”.
Depuis, Jean-Jacques se laisse porter par les événements. Marié depuis dix ans à une psychologue dénommée Catherine, père de deux enfants, Caroline 8 ans, et Michaël, 4 ans, il est devenu, selon les journaux de jeunes, un chanteur de charme, play-boy en herbe, atrocement sentimental. “Je n’ai pas l’impression de chanter des chansons d’amour… Peu importe, si on veut y voir du sentiment, pourquoi pas ! Pour moi, je fais de la musique de variété, c’est tout. Quant au play-boy, je continue vainement de le chercher. Je ne le rencontre jamais dans les boîtes de nuit en compagnie de brunes ou de blondes, je suis fidèle. Bien sûr, si on me demande quel est mon type de fille, je réponds, mais en fait je n’aspire qu’à une vie paisible”. Puis il ajoute : “L’argent est un côté agréable de ce métier. Aujourd’hui, je n’ai plus de problèmes pour payer mon loyer. Je vais au restaurant (on m’invite). Je ne voyage plus en stop, mais en avion et je descends, vedettariat oblige, dans les plus beaux hôtels. Pourtant, parfois, j'aimerais mieux dormir sous une tente et jouer de la guitare à la porte d'un restaurant, juste pour le plaisir de jouer… Ce n’est plus possible”.
Il y a presque du regret dans la voix de Jean-Jacques Goldman. Le sourire est là. Commercial ? Peut-être. Il faut accepter les interviews. Parfois, ce n’est pas désagréable. “De toute manière, je me contente de répondre aux questions, en espérant qu’on me comprendra. Est-ce réellement une tare que de ne pas avoir d’ambition ?…”
Légende photo : Quand on est chanteur, il faut faire des disques, de la scène et même des séances de photos : “les supplices de la profession”.
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