Jean-Jacques Goldman lessive les clips !
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Jean-Jacques Goldman lessive les clips !
[Publication inconnue], 1984
[Journaliste inconnu]
Retranscription de Anne Lambert
Vous connaissez la meilleure blague belge qu’on ait “infligée” aux français depuis longtemps ? Celles dont ils évitent de faire des gorges chaudes ? Evident ! Le coq français n’a pas lancé son cocorico… clip à temps. Il s’est fait devancer (et déplumer) par son cousin d’outre-Quiévrain. Sans liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur. Après avoir essuyé les plâtres plus souvent qu’à son tour, voilà donc la Belgique sacrée patrie du clip choc par les chanteurs français. Après Gotainer, et son Youki, c’est un Jean-Jacques Goldman amaigri par une longue tournée de 90 dates, étalée sur quatre mois, qui a confié son sort aux mains expertes d’une équipe bruxelloise, Dream Factory, classée seconde curiosité locale, juste derrière MannekenPis mais avant l’Atomium. Dans ses bagages, Goldman a emporté son “sculpteur d’images”, Bernard Schmitt, copain lyonnais de longue date qui a déjà signé les clips “Envole-moi” et “Encore un matin”. Cette fois, c’est au tour d’“Américain” (également extraite de l’album “Positif”) de se transformer en clip pour la postérité. “Le moteur, c’est la chanson”, raconte celui qui soigne le côté visuel du chanteur. “On se raconte une histoire dans laquelle on se sent bien”, enchaîne Goldman qui se prête de bonne grâce à ce qu’il appelle “une contingence du métier” qui ne semble pas franchement le passionner. Pas mordu, Jean-Jacques. Et on le comprend : “La promotion du disque coûte plus cher que sa réalisation. C’est paradoxal. Les clips actuels du style poudre aux yeux me font songer aux lessives. On achète plus de publicité et d’emballage que de savon…”. Du coup, il insiste énormément pour ne pas masquer sa chanson sous une épaisse couche de vernis opaque. Mais reprenons nos esprits. Lui, il se concentre sur la musique avec ce nouvel album prévu pour fin 85, qui est à peine ébauché dans un petit carnet où des notes pattes de mouche sont éparpillées dans un savant embrouillamini. Et puis, un autre projet lui trotte, dans la tête, bien entamé celui-là : cet album avec Michael Jones, signé du nom de son guitariste, mais où il a mis la main à la pâte. S’il se décrit lui-même comme totalement incompétent pour s’occuper d’une chose aussi indispensable aujourd’hui qu’un univers visuel sensé lui appartenir exclusivement (d’où la délégation de pouvoirs à Bernard), il a tout de même cédé aux appels du pied du cinéma. Pas comme acteur (il ne “fond” pas). Mais comme compositeur de la musique du premier film d’un jeune réalisateur, Yves Comte. “En résumé, Christophe Malavoy, Sami Frey et Marie-France Pisier sont embarqués dans une histoire policière, un peu nihiliste, vécue par des soixante-huitards désabusés”. Avec sa simplicité pour guide, il a pris la tête du succès sans que celui-ci monte à la sienne. En situant chaque prestation à sa juste valeur : “J’ai goûté à la scène. C’est l’enfer…” Un enfer pavé de satisfactions : “Mais c’est divin…”
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