Goldman remarche seul
|
Goldman remarche seul
Télé Câble Satellite Hebdo n° 32, novembre 1997
Serge Bressan
Retranscription de Dominique Surgon
Apres avoir écrit pour les autres, JJG sort un nouveau CD rien que pour lui, "En passant". Un album et onze nouvelles chansons d'un homme qui se confie rarement aux médias et ne manque pas d'états d'âme.
Selon un récent sondage, derrière l'Abbé Pierre et Jean-Paul Belmondo, JJG est le plus populaire des Français. A 46 ans, il vient de sortir un nouvel album, et a accepté de parler. De lui, un peu ; de musique et de chanson, beaucoup.
Serge Bressan : Avec ce nouvel album, "En passant" vous avez éprouvé le besoin de redevenir chanteur...
Jean-Jacques Goldman : Disons qu'il y avait dix ou onze chansons qui n'appartenaient à personne, qui ne s'adressaient qu'à moi... Ces chansons ont été écrites dans les six mois qui ont précédé la sortie de l'album, mais les textes et les musiques ont mûri pendant deux, trois ans. C'est d'ailleurs l'espace normal entre deux albums.
Serge Bressan : Franchement, vous avez encore le temps de travailler pour vous avec tout ce que vous faites pour les autres ?
Jean-Jacques Goldman : Mais faites le calcul : un album, c'est à peu pres onze chansons. J'ai écrit une dizaine de chansons pour Céline Dion, voilà trois ans, deux chansons pour Khaled et Johnny Hallyday, une pour Patricia Kaas. A l'arrivée, ça ne représente pas plus de six, sept chansons par an !
Serge Bressan : N'empêche ! On a l'impression que vous êtes partout...
Jean-Jacques Goldman : Peut-être parce que ces chansons marchent !
Serge Bressan : Vous vous en réservez certaines...
Jean-Jacques Goldman : Oui. Je sais que certains textes n'intéresseron pas les autres interprètes. Je ne suis pas persuadé qu'un thème comme "Sache que je" puisse intéresser un autre que moi...
Serge Bressan : Vous entretenez la discrétion qui vous entoure. Peut-on savoir, quand même, comment vous travaillez...
Jean-Jacques Goldman : Seul et beaucoup la nuit. Quoi que je fasse dans la journée, quelles que soient les personnes rencontrées dans la journée, les heures de 23 h à 3 h m'appartiennent. Presque systématiquement. C'est le moment de tranquillité absolue. Il y a la nuit qui déclenche des thèmes musicaux. C'est d'ailleurs souvent à ce moment là que je fais des maquettes et que les ambiances viennent doucement.
Serge Bressan : "En passant" est-il, comme on dit aujourd'hui, un album-concept ?
Jean-Jacques Goldman : Je dirai plutôt que ce sont onze états d'âme qui, à un moment, ont formé un tout. Et j'ai beaucoup de mal à analyser ce tout. Le titre "En passant" m'est venu, une fois l'album terminé, parce qu'il m'a semblé bien refléter l'esprit un peu flâneur des thèmes abordés.
Serge Bressan : Dans le monde de la musique, c'est la tradition : un artiste est toujours content de son dernier album...
Jean-Jacques Goldman : Je ne dirai pas que je suis content mais plutôt que je n'ai pas le choix. Un album qui sort, c'est le reflet de ce qu'on a été pendant ces trois, quatre dernières années.
Serge Bressan : Y a-t-il un moment précis où vous avez pris conscience de votre importance et aussi de votre puissance dans ce monde de la musique ?
Jean-Jacques Goldman : C'est surprenant. Et en même temps, c'est très long d'arriver à la notoriété. Par contre, lorsqu'on y est, on a vite beaucoup de pouvoir. Je pense que dès mon deuxième album, j'avais les coudées franches, que j'étais très libre. Et ça, c'est un grand privilège.
Serge Bressan : On dit aussi que vous appliquez toujours la meme recette, qu'il y a une "Méthode Goldman"...
Jean-Jacques Goldman : Sur le plan des textes, je me coule absolument dans la personnalité pour qui j'écris. Des chansons de femmes pour Dion, des chansons de rocker pour Johnny Hallyday, des chansons d'un Algérien pour Khaled. Sur le plan musical, je suis beaucoup plus limité - on ne dispose malheureusement que de sept notes. Donc, on peut reconnaître ma façon de composer, j'en suis tout à fait conscient. C'est normal quand on a écrit et composé plus d'une centaine de chansons.
Serge Bressan : On vous reproche souvent votre discrétion extrême...
Jean-Jacques Goldman : Mais je n'ai pas d'idée brillante sur la guerre israélo-palestinienne, ni sur le Stade de France ou Lady Di - donc, je n'ai pas à m'exprimer sur ces sujets. Je m'exprime à partir de l'instant où j'ai des choses à dire, et là, je revendique ce que je dis - en tant que chanteur qui a fait un album. Parce que je suis un professionnel de la chanson. Et, de façon très immodeste, j'ai l'impression d'avoir ce talent-là, celui de savoir écrire des chansons...
Retour au sommaire - Retour à l'année 1997