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Un jean's et trois T-shirts
(La Libre Belgique, 10 octobre 2003)

Un jean's et trois T-shirts
La Libre Belgique, 10 octobre 2003
Article de Cédric Petit

Pour son nouvel album en français, "Une fille et quatre types", Céline Dion joue la carte de la "rock'n roll attitude". Un disque qu'elle a présenté depuis le Caesar's Palace à Las Vegas, où elle joue chaque soir le spectacle "A new day...".

À Las Vegas

Un salon climatisé lové dans un des plus prestigieux hôtels de Vegas, le Caesar's Palace. Et pour principal élément d'information, une vidéo présentée par René Angélil, le mari et manager de Céline Dion (vidéo par ailleurs disponible sur le site de la star). Sur l'écran, quatre "types" : Jean-Jacques Goldman, Erick Benzi, Jacques Veneruso et Gildas Arzel. Un grand manitou de la chanson française, son réalisateur attitré, le parolier de "Sous le vent" (succès de Garou) et un guitariste qualifié d'exceptionnel. A quatre, ils se sont penchés sur le cas de Céline Dion pour son nouvel album, à paraître lundi prochain, "Une fille et 4 types". Un virage à 180° pour la star canadienne, aujourd'hui en résidence à Las Vegas pour son show orchestré par Franco Dragone, six mois après la sortie de son dernier album en anglais "One heart".

L'histoire commence il y a tout juste un an, en septembre 2002. Céline n'a alors pas encore requis Bousval et environs pour les répétitions de son spectacle à La Louvière, en compagnie de ses soixante danseurs. "A new day...", qui va la solliciter durant trois ans à partir de mars 2003, ne débutera que dans six mois, en mars 2003. Mais l'avenir discographique de dame Dion est tout tracé : à l'automne de la même année, selon la logique d'alternance (anglais-français) de parution de ses disques, le marché doit accueillir un Céline Dion francophone, histoire de se rappeler aux auditeurs de l'Hexagone et du Québec, privés de ses apparitions pour trois étés. René Angélil passe alors commande à Jean-Jacques Goldman, déjà sollicité pour "D'eux", qui a révélé Céline Dion en France et en Belgique, et pour "S'il suffisait d'aimer", qui a définitivement scellé l'union du chanteur français et de son alter ego québécoise. "Un troisième album, please".

Dans l'Amérique profonde

Léger couac : "JJG" estime avoir "fait le tour de la question" et ne pouvoir livrer que deux titres, pas plus. Pour sa seconde réalisation commandée par Céline, Goldman n'avait déjà plus livré un album complet, confiant à Erick Benzi les clefs de deux titres ("Papillon" et "Terre"). Nouvel appel du pied : "nous lui avons demandé de réfléchir", dixit René Angélil, "et il est revenu avec le concept de "Une fille et quatre types". En somme, convoquer trois auteurs compositeurs à la rescousse et former un groupe autour de Céline.

Dans la moiteur climatisée de l'Emperor's Bullroom, le projecteur dispense les images du making-of de l'album, enregistré en octobre 2002 à Paris. Tout sourires et compliments, les quatre respectables types y relatent leur parcours. Pour l'essentiel, enchanté et à la tonalité rock'n roll, ce que le principal sujet du film ne se privera pas de rappeler, lors de l'enregistrement d'une émission spéciale pour TF1, effectué mercredi dernier dans le même Caesar's Palace, deux étages plus bas, au Coliseum.

Cinq soirs par semaine, c'est à cet endroit précis qu'elle interprète les 22 titres de "A new day", devant un parterre de 4 000 spectateurs, au sein de cette salle de spectacle pharaonesque spécialement construite à son intention. La société américaine qui gère le Caesar's Palace a déboursé pour cet écrin 95 millions de dollars, qui pourraient être amortis au terme du spectacle de Dragone, en mars 2006. A cet égard, Park Place Entertainment escompte que chaque personne qui assiste au spectacle dépense 50 dollars supplémentaires aux alentours de la salle. Les occasions sont légion, que ce soit dans l'une des nombreuses machines à sou, sur les tables de jeu, ou encore dans la boutique rutilante édifiée au nom de la star, où s'écoulent coupes de champagne, eau minérale, parfums, T-shirts à son effigie et éventuellement... albums.

Dans la ville de toutes les démesures, où l'argent perd valeur, odeur et couleur, où les lagunes de Venise voisinent avec les pyramides de style égyptien, Céline joue à guichets fermés depuis 6 mois, moyennant entre 87,50 et 225 dollars la place, c'est-à-dire le prix le plus cher demandé pour un spectacle non-sportif à Las Vegas. Seuls jusqu'à présent les matches de boxe, tel celui qui opposait cette même semaine Evander Holyfield à James Toney, restent plus onéreux.

En ce début octobre, elle y reçoit ainsi les honneurs de la première télévision française, qui lui consacre une soirée d'hommage (diffusée le 5 novembre prochain). Elle y célèbre des bonheurs "rock'n rôle", accent canadien inclus : des tournées dans des bars américains, à bord d'un bus, le goût de la poussière et la sensation de n'emporter avec soi qu'"un jean's et trois T-shirts" pour une odyssée sur les routes des Etats-Unis. Et Céline de confier à la presse, le lendemain : "J'aurais aimé savoir jouer de la guitare pour cet album, pour me donner un look encore plus cool".

A défaut, pour la pochette, on pose dans les motels, on siffle la sérénade dans des wasserettes, pendant que le contenu du baluchon tourne dans le séchoir...

Tous les poncifs du genre y sont, en sus de l'image d'une complicité totale entre la chanteuse et ses quatre accompagnateurs, à la base des douze titres, majoritairement des ballades ("Mon homme", "Contre nature", "Valse adieu" en titre caché) de "Une fille et quatre types". Sur scène, il est vrai que la native de Charlemagne, au Québec, ne rate jamais une occasion de battre le tempo et de s'approprier la gestuelle du parfait guitariste, y compris dans les chansons de "A new day" qui s'y prêtent le moins... Musique du diable, quand tu nous tiens...

Pourtant, officiellement pour une "question d'agenda", aucun des quatre gaillards de son band n'honorera l'émission de sa présence. Un contre-temps qui n'aura pas inquiété outre mesure TF1 : un bricolage sur base de séquences tournées trois mois plus tôt, intégrées dans le produit propre de la spéciale animée par Flavie Flament, fera l'affaire. "On fera comme si", plaisante le chauffeur de salle, pour exhorter le public d'invités à applaudir à tout rompre à la fin de la prestation de Goldman et compagnie, diffusée sur ce plus grand écran de télévision du monde, cher à "René", qui sert d'arrière-plan au spectacle. En leur dommageable absence, la fête se concentrera autour d'autres visages de la variété française, pourtant nullement impliqués dans "Une fille et quatre types" mais probablement tout aussi aptes à incarner l'âme de l'Amérique profonde que projette le disque : Florent Pagny (qui vomira son dégoût de la société de consommation façon Vegas), Henri Salvador (venu "promener madame"), Charles Aznavour (pour le témoignage d'une légende), Patrick Fiori (par hasard), Garou, Gérard Darmon... Leçon accélérée de compagnonnage avec les vedettes pour la jeune Anne, candidate de la "Star Academy" en cours, qui, à titre spécial, aura pu converser les yeux dans les yeux avec Céline, le temps d'une rencontre en coulisses, dûment relatée dans l'émission de la semaine dernière.

Une corde à son arc

Fin des frasques. Le jour qui suit, le quotidien de la diva reprend son cours. Au placard le denim bleu, les bottes façon Johnny et la coiffure en pétard : pour se confier à la presse canadienne (surtout), française (un peu) et belge (anecdotiquement), la maman du petit René- Charles retrouve les paillettes, la coiffure peroxydée et les talons aiguille, sous l'oeil bienveillant de son René d'époux. Céline Dion pile et face ? Le côté rock'n roll "est une couleur de mon image que nous n'avions pas encore exploitée", explique-t-elle en toute franchise et décontraction, alors que les journalistes québécois se disputent ses faveurs à coups de compliments : sa nouvelle coiffure, sa vie de rêve et ses rêves de vie ("avoir du temps"), sa simplicité et la maestria avec laquelle elle combine ses obligations de mère et celles de chanteuse. Et la star de répondre qu'elle mène une vie "normale", très éloignée de celle qu'on lui prête, de raconter sa journée type dans "leur maison de plain-pied" : "Quand j'entends pleurer René-Charles, j'accours dans sa chambre pendant que notre cuisinier Olivier prépare le repas, dans une odeur d'oignon et de fromage. On ne vit pas dans un palace. Notre palace, c'est notre fils". Les violons sont de sortie : à trois ans, le garçon concentre toute l'attention de sa célébrité de mère, lui qu'elle salue, tous les jours à 17 heures avant de partir, et qu'elle vient une dernière fois embrasser le soir, après chacune de ses prestations. Un tableau idyllique qu'on ne demande évidemment qu'à prendre pour argent comptant.

"Tout l'or des hommes/ne vaut plus rien/si tu es loin de moi", le premier single, confirme la donne, comme il démontre la capacité de Benzi, Arzel, Veneruso et Goldman de se glisser dans la peau de leur interprète. A moins que ce ne soit le contraire, la "Rolls des chanteuses", comme la qualifie Gildas Arzel, pouvant se prêter à tous les styles musicaux, donner de la voix sur tous les textes et les mélodies qu'on lui présente, comme c'est d'ailleurs le cas dans le spectacle de Dragone, où C.D. se frotte à tous les genres, du music- hall au rythm'n blues avec, convenons-en, un égal bonheur. "Elle ouvre la bouche, ça fait un disque", surenchérit l'artisan Goldman, à qui l'on pense directement à l'écoute de "Je lui dirai" (prolongement de ses "Chansons pour les pieds"). "Je t'aime encore" (qui répond à la supplique "Pour que tu m'aimes encore" de "D'eux") intègre aussi dans ses paroles la métamorphose "rock'n rollisante" de la jeune maman : "j'ai coupé mes cheveux/enfin me dirais-tu. J'apprends la guitare/ J'en suis à trois accords". En tout état de cause, Céline a ajouté ce titre à son spectacle américain, manière de préparer le terrain de ce côté-là de l'Atlantique, conquis par sa reprise du classique de Roy Orbison "I drove all night", bande originale de la dernière publicité Chrysler.

A Las Vegas, Céline Dion n'a pas l'exclusivité de la gloire, loin s'en faut. Mis à part autour du Caesar's Palace, il n'y a guère que quelques taxis qui vantent "A new day". Et leurs chauffeurs ont certes entendu parler de la chanteuse, l'unanimité se fait davantage autour de Siegfried et Roy, les deux magiciens sexagénaires. L'incident de samedi dernier (leur tigre blanc a agrippé le cou de Roy et l'a traîné sur plusieurs mètres) a d'ailleurs fait les gros titres de la presse locale, d'autant plus qu'il a contraint les artistes à annuler plusieurs dates.

Face à eux, l'interprète multi-millionnaire de "My heart will go on" a encore de la marge, puisqu'ils occupent le terrain depuis trente ans, et ont signé en 2001 un contrat à vie avec l'hôtel-casino Mirage. Ils affichaient 5 751 représentations dans la capitale du kitsch, contre une grosse centaine pour la chanteuse canadienne. Qui se défend d'avoir voulu faire un "coup médiatique" en venant s'installer à Las Vegas et assure orienter sa carrière en fonction de son plaisir et de ses envies. Quoi qu'il en soit, radios, télévisions, magasins de disques, presse musicale et généraliste peuvent se préparer à l'assaut dans les semaines à venir. Au menu : un son prétendument "brut de décoffrage" ! Les puristes apprécieront !


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