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La touche magique de Jean-Jacques Goldman
(La Presse (Québec), 11 octobre 2003)

La touche magique de Jean-Jacques Goldman
La Presse (Québec), 11 octobre 2003
Propos recueillis par Louis-Bernard Robitaille
Retranscription de Anne-Caroline Hessemans et de Nicolas Minck

Jean-Jacques Goldman a donné à Céline Dion deux albums, dont le plus grand succès de l'histoire du disque français, "D'eux". Maître d'œuvre et auteur de trois chansons de "1 fille & quatre types", Goldman a bien voulu raconter à La Presse la genèse de ce nouvel album de la chanteuse québécoise. Rencontre avec un artiste inclassable.

Dans cet hôtel de vacances de Plan-de-Cuques (eh oui !), un village de la périphérie de Marseille, où il s'est récemment installé, j'attendais de voir apparaître Jean-Jacques Goldman sur sa moto, son seul moyen de locomotion à Paris.

Rien à l'horizon. Je regarde distraitement un type filiforme se pointer sur son vélo, vêtu de noir et coiffé d'une casquette, s'arrêter devant le portail, fixer son redoutable engin à la grille avec un antivol. Tout ça sans un bruit, comme dans un film muet. Un employé de l'hôtel ? Le type enlève sa casquette et me dévisage tranquillement sans un mot : c'est Goldman.

L'un des patrons du show-business français, celui qui a écrit paroles et musique du plus grand succès de l'histoire du disque français ("D'eux" : six millions d'albums) et qui touche chaque année le plus gros paquet de redevance de la SACEM, vient donc à ses rendez-vous à bicyclette, l'air de passer dans le coin par hasard. Bien sûr, le grand appartement où il s'est récemment installé est à quelques centaines de mètres… cela a peut-être à voir avec sa préoccupation majeure du moment : "Ce que je fais surtout ces jours-ci, me dit-il, ce sont des gammes tennistiques. Mais rassurez-vous je ne suis pas un joueur classé, plutôt un sous-doué".

Il y a des vedettes qui aiment bien la publicité : les plus nombreuses. Il y a celles qui fuient la foule et les journalistes. Jean-Jacques Goldman se situe entre les deux. Quand il sort un album à lui – ou pour un autre artiste d'ailleurs –, il accepte de "faire ce qu'il faut" côté promotion : quelques grosses télés, quelques interviews, "pour faire connaître ce qu'on a fait". Très simplement, sans faire d'histoires, mais sans enthousiasme non plus. Depuis le début de sa carrière, il y a vingt ans, il a toujours posé comme condition aux magazines qui l'interviewaient… que sa photo ne soit pas publiée en couverture.

La sortie imminente de cet album en français de Céline Dion ("1 fille & 4 types") – pour lequel il a été à la fois le maître d'œuvre et l'auteur de trois chansons - ne semble pas le bouleverser outre mesure, malgré l'énormité de la machine.

"Moi, ma partie est terminée, dit-il. A Las Vegas, à la fin de l'été, nous sommes allés huit jours pour terminer l'album, c'est-à-dire enregistrer la voix de Céline sur les douze chansons, ce qui s'est fait à une vitesse incroyable. Mais, en même temps, nous avons tourné le clip de "Tout l'or des hommes", nous avons mis en boîte une grosse émission pour la télé française, nous avons fait des photos et un peu de promotion… Donc c'est fait. Bien sûr, quelqu'un a lancé l'idée d'une tournée que nous ferions, "1 fille & quatre types", mais pour que ça se fasse, il faudrait que Céline réussisse à dégager quelques semaines dans son emploi du temps. Et il faudrait qu'on accepte mes exigences maniaques en matière de travail et de mise au point du show. Donc c'est plutôt improbable…"

Une rencontre improbable

Ayant pondu ce qui devrait être, après "D'eux" et "S'il suffisait d'aimer", un nouvel œuf d'or (au moins deux millions d'exemplaires prévisibles), le gallinacé Goldman se retire donc paisiblement dans son antre marseillais.

"Vous savez, j'ai tout adoré dans ce métier : j'ai adoré commencer à avoir du succès, adoré faire mes premières scènes, puis attaquer les très grandes salles, j'ai adoré qu'on me demande de faire des chansons pour Johnny Hallyday, puis j'ai adoré donner un coup de main à d'excellents chanteurs. Mais aujourd'hui, c'est fait. Alors, j'ai moins besoin de faire sortir de moi tout ce trop-plein que j'avais à 20 ou 25 ans. Alors, j'en fais beaucoup moins. J'ai 52 ans, et je me considère un peu comme un préretraité. D'ailleurs, c'est un métier, qu'on le veuille ou non, qui a un rapport avec la jeunesse. Vous me direz qu'il y a encore Mick Jagger qui chante à 60 ans. Mais il chante des tubes qui datent de 30 ans. Et le public a 60 ans également…"

Non pas que Goldman soit désabusé, encore moins détaché de ce nouvel album dont il a dirigé la création depuis le printemps 2002 : "Céline, dit-il aussitôt, est l'une des cinq plus grandes voix que je connaisse. Ce n'est pas seulement le timbre de la voix, qu'on peut aimer ou pas : elle a une créativité vocale exceptionnelle. Si on lui donne une chanson à chanter, elle en refait aussitôt quelque chose à elle, elle va plus loin, elle invente. D'ailleurs, c'est sa partie à elle qui a été la plus rapide : on a mis six ou sept mois à peaufiner les arrangements, les chœurs, les cordes, et elle, à Las Vegas, a enregistré les chansons en quelques jours, à raison de trois chansons en deux heures. Un phénomène".

L'affaire a donc commencé il y a environ 18 mois : René Angelil et Céline proposent à Goldman de refaire un troisième album : "Je leur ai dit que je ne me sentais pas prêt pour faire un disque entier pour elle. Dans mes tiroirs, j'avais des notes et des idées pour deux ou trois chansons, pas plus. René m'a quand même demandé d'être le maître d'œuvre, pour assurer la cohérence de l'album".

JJ a donc rameuté ses habituels copains, Benzi (Erick), Arzel (Gildas), Veneruso (Jacques). La plupart anciens d'un groupe de folk rock marseillais des années 80, le groupe Canada ! "A partir du moment où je leur demandais des chansons, je savais à peu près ce qu'ils allaient me proposer. Seule indication de ma part : que je privilégierais les chansons avec une partie chorale. Pour faire groupe… Après, ce fut la routine habituelle : j'ai eu 30 chansons en main, j'en ai gardé 20, puis une quinzaine. Venue à Paris en septembre 2002 pour la promotion de son album en anglais – moi, je faisais le Zénith –, Céline a fait des maquettes en studio. On a retravaillé la musique pendant six ou sept mois. Et puis voilà : Céline a mis sa voix là-dessus…"

A priori, rien de plus improbable que cette rencontre entre Céline Dion-Angelil et un Goldman issu de la banlieue parisienne, de l'immigration juive par ses parents, mais aussi de l'effervescence intello-gauchiste de la fin des années 70. Et dont le mode de vie - jeans, moto, maison en banlieue populaire de Paris – n'était pas vraiment celui de Nord-Américains lancés à l'assaut des Etats-Unis.

"Je n'ai jamais eu de problèmes avec ça, dit-il. J'ai toujours trouvé Céline cohérente avec le monde du showbiz que je connaissais bien. Je m'entends très bien en France avec tous les chanteurs, même quand ils sont rapidement classés "à droite", comme Sardou : après tout, ils sont tous démocrates, ce qui me semble par les temps qui courent, non seulement suffisant, mais héroïque. Dans la chanson, je ne rencontre pas souvent des auteurs qui chantent la pureté de la race ou me conseillent de déménager en Israël…"

"Et puis, je connaissais un peu le Québec, où j'étais allé à deux ou trois reprises – sans aucun succès, d'ailleurs (sourire). Et donc, quand on s'est vus pour la première fois au restaurant Chez Pauline, en 1993, tout a été très normal. Eux ne savaient pratiquement pas ce que je faisais, et elle était encore à un mois de la sortie de "Power of Love". Bref, personne n'était impressionné… Tout ce que je peux dire, c'est que ça s'est toujours passé parfaitement avec elle. Pour "D'eux", on avait fait un gros travail de simplification, pour gommer ses maniérismes américains, cette façon de surjouer, de trop accentuer les effets. On a de nouveau travaillé là-dessus pour cet album, car les tics américains étaient revenus. Mais avec Céline, pas de problème, on peut tout lui dire. Elle est extraordinairement modeste dans le travail".


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