Le mystère Goldman
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Le mystère Goldman
VSD, du 19 au 25 septembre 2007
Pierre Sled
Retranscription de Delphine Roger
Le chanteur est absent de la scène depuis quatre ans
En exclusivité, Michael Jones, son ami et musicien de longue date, parle du nouvel homme : la guitare de côté, la famille au centre de tout.
Michael Jones a rencontré Jean-Jacques Goldman en 1977, à l’époque de "Taï Phong". Après le succès de Sister Jane et des deux premiers albums, le groupe devait partir en tournée, mais Jean-Jacques, le leader, ne pouvant lâcher son magasin de sport à Montrouge (92), a cherché un remplaçant. Michael Jones a passé le casting et a été choisi. Le début de l’aventure.
Pierre Sled : Comment s’est traduit votre coup de foudre musical ?
Michael Jones : Nous deux nous écoutions AC/DC et Status Quo, les autres membres du groupe, Genesis et Pink Floyd. Rapidement ça a explosé.
Pierre Sled : Vous vous êtes retrouvés bien plus tard, quand sa carrière solo était au top, avec Carole Fredericks. Pourquoi ce partage ?
Michael Jones : C’était, je crois, du réalisme professionnel de sa part. Il disait qu’il n’arrivait plus à écrire pour lui et voulait monter un trio avec moi et une femme. Carole travaillait déjà avec nous, il m’a annoncé la naissance de Fredericks-Goldman-Jones dans la voiture en allant à un concert à Toulouse.
Pierre Sled : Depuis 2003 on ne le voit plus du tout, sauf sur la tournée des Enfoirés. Il paraît même qu’il s’est séparé de ses guitares. La musique, c’est fini pour lui ?
Michael Jones : C’est vrai qu’il a donné plusieurs guitares à des œuvres caritatives, mais il a gardé celles qui lui sont chères. Professionnellement, en dehors de sa participation à mon dernier album, celui de Patrick Fiori, et un coup de main à mon groupe El Club , il ne fait plus rien.
Pierre Sled : Panne d’inspiration ?
Michael Jones : Non. Il a décidé de se consacrer à l’éducation de ses trois derniers enfants, Maya, qui a presque 3 ans, Kimi, 18 mois, et Rose, 2 mois. D’après ce que j’ai vu, c’est un boulot à plein temps ! Il se lève tous les matins à 7 heures pour préparer les biberons, changer les couches, faire les courses. Il passe de l’une à l’autre.
Pierre Sled : Un père au foyer épanoui ?
Michael Jones : Il a l’air très heureux. Je crois qu’il rattrape une période qu’il n’a pas vécue avec les trois premiers à cause des tournées et des enregistrements. Il veut en profiter.
Pierre Sled : Que font les "grands", aujourd’hui ?
Michael Jones : Caroline a 31 ans ; après une école de commerce, elle bosse. Michael a 27 ans, il est producteur et réalisateur de musique, et Nina suit des études de médecine.
Pierre Sled : De Nathalie, sa femme depuis six ans, on sait très peu de choses.
Michael Jones : Il a toujours protégé sa vie privée, il est très strict là-dessus. Je l’ai d’ailleurs prévenu que je faisais cette interview.
Pierre Sled : Il a donné son accord ?
Michael Jones : Il m’a dit que, de toute façon, il ne pouvait pas empêcher les journaux de parler de lui, alors autant que ce soit avec moi. On est en confiance.
Pierre Sled : Comment se sont-ils connus ?
Michael Jones : Sur la Tournée des campagnes, en 1995. Elle avait 14 ans et était venue avec sa mère. Ils ont correspondu pendant des années, puis ont fini par se dire qu’ils étaient faits l’un pour l’autre. Ils se sont mariés peu de temps après avoir officialisé leur liaison. Ce qui lui a plu dès le début, c’est qu’elle n’était pas une groupie et qu’elle écrivait très bien.
Pierre Sled : Quelle femme est-elle ?
Michael Jones : Elle est très sportive et très intelligente. Elle enseigne les mathématiques dans un collège de Marseille. En ce moment, elle est en congé maternité, mais elle va bientôt retrouver son poste. C’est elle qui a fait adopter sa ville à Jean-Jacques. Ils forment vraiment un beau couple.
Pierre Sled : Ils habitent une maison très protégée, j’imagine.
Michael Jones : Pas du tout, un appartement sans prétention de quatre pièces avec des meubles Ikea, une télé, un réfrigérateur et une chaîne stéréo. Jean-Jacques est l’antistar par excellence. Il vit comme il a toujours vécu. Il n’aime pas sortir, a la même voiture depuis quinze ans, une Clio qui n’a que 17 000 kilomètres au compteur ! L’autre jour, il m’a appelé parce qu’elle ne démarrait pas. Je lui ai demandé si ça se produisait souvent, il m’a répondu : "Je ne sais pas, je ne l’ai pas touchée depuis six mois !"
Pierre Sled : A part pouponner, que fait-il de ses journées ?
Michael Jones : Du sport, comme un malade. Surtout du tennis. Il s’inscrit même dans des tournois. C’est sûr que ça doit faire bizarre à ses adversaires quand ils découvrent qu’ils jouent contre lui.
Pierre Sled : On a du mal à l’imaginer avec l’esprit de compétition.
Michael Jones : Tu parles, c’est une teigne, il ne lâche jamais. Il est en fait assez mauvais joueur, très râleur, surtout contre lui-même, d’ailleurs. Il doit être classé autour de 30, mais il est persuadé qu’il peut toujours progresser. Il ne pense qu’à ça.
Pierre Sled : Et ce sont ces deux heures de tennis quotidiennes qui l’empêchent de faire de la musique ?
Michael Jones : Il dit qu’il n’a pas le temps. Il nage aussi ou fait du vélo.
Pierre Sled : Il va bien s’y remettre un jour ?
Michael Jones : Oui, dans deux ou trois ans, quand les petites iront à l’école. De toute façon, il n’a pas besoin de cela pour vivre. Quand il reviendra, ce sera par plaisir et par inspiration. Mais il suit tout ce qui se passe dans le monde musical, même s’il est déçu par la dérive de la chanson française, par le fait que ce soit les maisons de disques et les médias qui décident de tout… Parmi la nouvelle génération, il m’a parlé récemment de Christophe Maé.
Pierre Sled : Ensemble, vous ne parlez que de musique ?
Michael Jones : De tout, il est de très bon conseil, franc, ne cherchant pas à faire plaisir coûte que coûte. Jean-Jacques est très cultivé, en littérature notamment. Pour cadeau de mariage, il a demandé à chaque invité de lui offrir son livre favori. Je lui ai apporté une biographie de Churchill.
Pierre Sled : Pourquoi Churchill ?
Michael Jones : Parce qu’il était très inventif. C’est aussi une qualité de Jean-Jacques : 80 % des idées de mise en scène sur les tournées viennent de lui. Lors de la dernière, il avait imaginé une scène qui s’inclinait à angle droit. Au départ, je l’ai pris pour un fou mais, avec le système de baudrier qu’il a demandé, on a pu jouer à l’aise… dans le vide.
Pierre Sled : Comment a-t-il vécu la campagne présidentielle ?
Michael Jones : Fondamentalement, c’est un homme de gauche, mais je ne crois pas qu’il ait apprécié ce qu’a proposé Ségolène Royal. L’époque Mitterrand l’a rendu désabusé.
Pierre Sled : A-t-il une meilleure opinion du nouveau président ?
Michael Jones : Il attend de voir sans être critique par principe, même s’ils ont un point commun : Jean-Jacques ne boit pas une goutte d’alcool.
[Légende photo 1 (Patrick Gherdoussi / MAXPPP)] : Un ascète retiré du show-biz. Jean-Jacques Goldman a déserté les studios d’enregistrement comme la scène. Une supervision d’album et de tournée pour Céline Dion par-ci, une apparition lors d’un concert caritatif par-là… Pour lui, la vie est ailleurs.
[Légende photos 2 et 3 (Alexandre Auriot / Dalle, Lawrence / Starface)] : "Pour cadeau de mariage, il a demandé à chaque invité de lui offrir son livre favori". Fidèle à son ami et aux Enfoirés. Goldman a toujours apprécié de participer à des duos. Ci-dessous, avec son ami Michael Jones, sur scène en Suisse en 2002. Au-dessus, l’artiste avec Jenifer, dans la caravane des Enfoirés, pendant leur dernière tournée.
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