Bernard Violet :
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Bernard Violet : “J’avais forcément
un a priori favorable sur Jean-Jacques Goldman”
Parler d'sa vie, le 27 octobre 2010
Propos recueillis par Jean-Michel Fontaine
Cela fait plusieurs années que je me demande si, et quand, Bernard Violet écrira une biographie sur Jean-Jacques Goldman. En effet, en dehors du livre de Christian Page et Didier Varrod en 1987, on ne peut pas dire que ceux qui ont suivi soient une franche réussite. Actuellement, peu de personnes (Thierry Coljon, Bertrand Dicale, Fred Hidalgo, Bernard Lescure...) connaissent suffisamment bien l'œuvre de Jean-Jacques Goldman pour pouvoir prétendre écrire une biographie qui mérite le détour, tant sur la forme que le fond.
En mars 2010, Bernard Violet m’a contacté afin que je partage avec lui les treize ans que j’ai consacrés à mon site sur Jean-Jacques Goldman, "Parler d’sa vie". Alors que son livre - "Jean-Jacques Goldman, un homme bien comme il faut" - est aujourd’hui disponible dans les librairies et les grandes surfaces, c’est à mon tour de lui poser quelques questions.
Vous avez dédié des biographies à des personnes aussi diverses que Jacques-Yves Cousteau, Jacques Vergès, Alain Delon, Mylène Farmer, Johnny Hallyday, l’Abbé Pierre ou Jamel Debbouze. Pourquoi Jean-Jacques Goldman ?
Parce qu’artiste emblématique de la chanson française,
parce que mélodiste super talentueux - pour ne pas dire génial
-, parce que l’une des personnalités préférées
des Français. Et, enfin, parce qu’entouré d’un apparent
mystère.
Vous avez une réputation sulfureuse dans le monde des people, pour
avoir dévoilé les parts d’ombre ou les secrets des personnalités
auxquelles vous vous êtes intéressé. Vous êtes-vous
heurté à des fins de non recevoir lors de vos investigations
sur Jean-Jacques Goldman ?
Si écrire certaines vérités, c’est être sulfureux, j’admets alors l’être. Mais je vous retourne la question : qu’attendez-vous d’un biographe ? Qu’il se limite à l’histoire officielle qu’imposent les stars à travers des entretiens avec des journalistes triés sur le volet ? Ou bien qu’il tente de brosser le véridique portrait d’un personnage d’exception au-delà de sa légende ?
En ce qui concerne JJG, j’ai en effet été le destinataire d’un courriel, plutôt malhabile et franchement discourtois, d’Alexis Grosbois – le principal collaborateur de JJG - m’affirmant que son patron trouvait par essence "ridicule" une biographie dédiée à un chanteur. Sous entendu, à commencer par celle envisagée pour JJG. Par retour du courrier, j’ai répondu à JJG que je le trouvais gonflé d’affirmer pareille chose. Avant d’expliquer. D’abord en l’informant que Messieurs Hallyday et Noah avaient, eux, volontiers accepté dans un passé récent de collaborer à mes travaux (pour leur plus grande satisfaction) ; puis en lui rappelant comment plusieurs merveilleux morceaux qu’il avait justement écrits pour ces deux immenses artistes (il y en a d’autres) avaient été directement inspirés de leur vie personnelle. Autrement dit, à partir d’éléments qu’il avait puisés dans bon nombre d’articles de presse et autres biographies qui leur ont été consacrées…
En effectuant vos recherches, avez-vous trouvé des éléments qui ont remis en question votre perception de Jean-Jacques Goldman, soit positivement, soit négativement ?
J’avais forcément un a priori favorable, sans lequel je ne me serais pas lancé dans ce long travail. C’est difficile de "vivre" pendant près de deux ans avec un héros pour lequel vous n’avez pas un minimum d’empathie. Moins d’une évolution, je pense que mes perceptions ont été renforcées. Positivement à l’égard de l’artiste, ce qui est le plus important. Car, qu’on le veuille ou non, JJG est un artiste inspiré et respectueux de son public. Négativement concernant le personnage qui a certes de grandes qualités, mais qui se montre souvent compliqué et contradictoire. Sans parler de son ostracisme à l’endroit des journalistes qui, lui, relève à mon sens de la pathologie. Je pense que JJG est au fond un journaliste frustré. En même temps, il n’a pas toujours tort en ce qui concerne la profession, notamment lorsqu’il dénonce la paresse de bon nombre de mes confrères…
En 1997, sur Nostalgie, Jean-Jacques Goldman déclarait qu’il avait trois critères dans le choix de ses interprètes : "Le premier critère, c'est la voix. Il faut que la voix me touche. Le deuxième critère, c'est la personnalité. Il faut que ce soit une personne avec qui je puisse bien m'entendre. Et le troisième critère, c'est d'avoir l'impression que je peux leur être utile. Voilà. Que je peux leur apporter quelque chose. Il peut y avoir des gens qui me touchent beaucoup, qui ont des voix magnifiques, mais où je ne vois pas trop ce que je peux leur faire". Est-ce que le deuxième critère peut expliquer pourquoi il n’a plus écrit pour des exilés fiscaux ou des chanteurs qui chantent l’amour et la tolérance mais frappent leur femme ?
C’est une question à poser à JJG. Mais si c’est vraiment le cas, il se comporterait en moraliste ridicule. Que celui qui n’a jamais péché jette la première pierre… Cela étant, il a raison de travailler pour des artistes qu’il admire et avec lesquels il partage les mêmes valeurs.
Que pensez-vous de My Major Company, la société du fils de Jean-Jacques Goldman, Michaël Goldman, qui permet aux internautes de produire des artistes, comme Grégoire, pour citer le plus connu ?
Je consacre plusieurs pages aux activités professionnelles des aînés de JJG, Caroline et Michael. Si le concept de MMC est intéressant, il faut admettre aussi que ses patrons ne prennent guère de risques. Quoi qu’il en soit, un pari gagné par Goldman junior dans lequel sa star de père n’est d’ailleurs pas totalement étranger. Avec sa participation au lancement de MMC et, moins connue, grâce à la promotion que JJG assure chaque années dans le cadre des Restos du Cœur aux artistes faisant partie de l’écurie de Michael ; le même qui porte également les casquettes d’auteur et d’éditeur musical…
Quelle va être la suite de la carrière de Jean-Jacques Goldman, selon vous ?
Forcément familiale, et musicale… J’imagine très bien un nouvel et bel album, voire un sur scène en 2012…
Si vous aviez été Jean-Jacques Goldman, qu’auriez-vous fait de différent ?
Rien, mais plus souvent… Plaisanterie mise à part, à chacun son métier et les vaches seront bien gardées.
Si je me faisais l’avocat du Diable, je pourrais dire que, étant tout comme moi originaire d’un petit village poitevin et n’étant donc pas du sérail, vous exposez la part d’ombre des gens connus par jalousie. Que pensez-vous de cette analyse ?
Si la jalousie m’animait, j’écrirais des pamphlets, ce qui n’est pas le cas. En même temps, je pense qu’en révélant certains secrets "inavouables", j’apporte à mes héros une part d’humanité souvent plus passionnante que l’image qu’ils veulent imposer aux médias et à leurs admirateurs. Au final, qu’est-ce qui vaut mieux : la légende ou la vérité ?
Quand vous m’avez approché dans le cadre de la rédaction de votre ouvrage, vous disiez vouloir écrire un livre "à la fois bienveillant et le plus rigoureux possible". Pensez-vous avoir atteint votre objectif ?
En mon âme et conscience, je réponds : oui. Mais à partir d’aujourd’hui, c’est au lecteur de juger…
Avez-vous envoyé un exemplaire dédicacé à Jean-Jacques Goldman ?
Dans un premier temps, je ne pensais pas lui adresser un exemplaire dédicacé. Par crainte de rebuffade ou par pudeur, je ne sais. Mais je me suis finalement résolu à lui faire parvenir deux exemplaires de cette biographie "ridicule", mais qui n'enlève rien à l'admiration que je porte à l'immense artiste qu'il est...
Finalement, quelle opinion de Jean-Jacques Goldman avez-vous ? Le titre de votre livre, "Un homme bien comme il faut", ne serait-il pas ironique ?
Il n’y a absolument aucune ironie dans le choix du titre. Et pour dire vrai, il m’a été inspiré par une remarque d’un magistrat un peu people qui, un jour, a affirmé : "Johnny, c’est la France telle qu’elle est ; Jean-Jacques Goldman, c’est la France telle qu’elle devrait être…" Pour être clair, JJG est un pour moi un artiste surdoué et inspiré, mais aussi un personnage simple, honnête, subtil, généreux. Bref, un honnête homme dans le sens classique et noble du terme.
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