Auteur : Jean-Jacques Goldman
Compositeur : Jean-Jacques Goldman
Editée par : Editions J.R.G.
Version originale
Année : 1997
Interprétée par : Jean-Jacques Goldman
Distribuée par : Columbia / Sony Music
Un début de janvier, si j'ai bien su compter
Reste de fête ou bien voeux très appuyés
De Ruth ou de Moïshé, lequel a eu l'idée ?
Qu'importe j'ai gagné la course, et parmi des milliers
Nous avons tous été vainqueurs, même le dernier des derniers
Une fois au moins les meilleurs, nous qui sommes nés
Au creux de nos mères qu'il fait bon mûrir
Et puis j'ai vu de la lumière alors je suis sorti
Et j'ai dit
Bonne idée
Y'avait du soleil, des parfums, de la pluie
Chaque jour un nouveau réveil, chaque jour une autre nuit
Des routes et des motards et des matchs de rugby
Des spaghetti, Frédéric Dard et Johnny Winter aussi
On m'a dit c'est qu'une étincelle avant l'obscurité
Juste un passage, un arc en ciel, une étrange absurdité
Des frères, des tendres, des trésors à chercher
Des vertiges à prendre, à comprendre et des filles à caresser
J'me suis dit
Bonne idée
Et puis y'a toi qui débarque en ouvrant grand mes rideaux
Et des flots de couleurs éclatent et le beau semble bien plus beau
Et rien vraiment ne change mais tout est différent
Comme des festins qu'on mange seul ou en les partageant
Je marchais au hasard le soir était tombé
Avec mon sac et ma guitare j'étais un peu fatigué
Tout était si désert, où me désaltérer ?
Et puis j'ai vu de la lumière et je vous ai trouvés
Bonne idée
"Des routes et des motards et des matches de rugby Des spaghetti, Frédéric Dard et Johnny Winter aussi"
Artist News : Toujours à propos de textes. Parmi les bonnes choses que nous réserve la vie (cf. extrait), tu cites Frédéric Dard, grand manieur du langage. Comment décrirais-tu son style à quelqu'un qui ne l'a jamais lu ?
Jean-Jacques Goldman : "Les mots de Frédéric Dard ont une odeur, des poils, de la sueur, des frissons. Ils te touchent, mais tu peux aussi les toucher."
Jean-Paul Germonville : Il y a sur l'album une chanson intitulée "Bonne idée" qui commence de façon amusante, avec une certaine ironie.
Jean-Jacques Goldman : Je ne sais pas si c'est très ironique. Ou alors dans un sens qui n'est pas péjoratif. On ne sait pas trop pourquoi on est sur terre mais on a plein de raisons d'en être heureux : la montagne, boire un café. Plein de choses simples !
Jean-Paul Germonville : Vous êtes finalement très optimiste.
Jean-Jacques Goldman : Oui. Ça ne se sent peut être pas beaucoup dans mes chansons... Quoique ! Je suis très heureux d'être là.
Jean-Paul Germonville : Plein de gens ne partagent pas cet état d'esprit.
Jean-Jacques Goldman : C'est dommage.
Quelques mots "en passant"
L'Est Républicain, septembre 1997
Gilles Médioni : Vous évoquez vos parents dans "Bonne Idée". Ont-ils été étonnés ?
Jean-Jacques Goldman : Leur plus grande fierté, c'est que je revendique leurs prénoms, Ruth et Moïshé, eux qui ont tellement voulu être français. "Rouge" était déjà un hommage à leurs idées, perverties par la gauche du (appelons ça pudiquement) deuxième septennat.
Gilles Médioni : Que vous ont appris Ruth et Moïshé ?
Jean-Jacques Goldman : Le sens des valeurs. L'amour de la France. Le fait que rien ne va jamais de soi. Ni se promener dans la rue librement, ni voter, ni aller à l'école gratuitement, ni avoir de quoi manger. Je suis essentiellement ce qu'ils étaient. Ce qu'ils m'ont inculqué.
Gilles Médioni : Vous ont-ils élevé dans la religion juive ?
Jean-Jacques Goldman : A la maison, la religion était "l'opium du peuple" ! Mais l'engagement politique n'est pas si éloigné de la religion.
Goldman, un homme juste
L'Express, 25 septembre 1997
Fabrice Guillermet : Dans une autre chanson, "Bonne idée", vous faites un petit inventaire à la Prévert de ce qui vous touche. Pêle-mêle : Johnny Winter, Frédéric Dard ou le rugby et les routes. Vos petits bonheurs ?
Jean-Jacques Goldman : Toutes les raisons de trouver une journée belle. Winter est le guitariste qui m'a le plus influencé. J'aime dans le rugby les notions de solidarité. C'est bien plus qu'un sport. Tout le monde a sa place. Les gros, les grands. les petits, les lents, les rapides. J'aime les routes de traverse qui mènent à une destination inconnue. Quant à Frédéric Dard, il s'approprie les mots, les triture comme personne. Et derrière sa truculence, il y a de la générosité, de l'humanité à chaque ligne.
Jean-Jacques Goldman : "le bonheur est obscène"
Télé 7 Jours, 7 octobre 1997
Hervé Beaudis : Tu cites tes parents, ils l'ont pris comment ?
Jean-Jacques Goldman : Avec humour, surtout que je les cite de façon humoristique.
Hervé Beaudis : J'imagine qu'ils sont plutôt fiers de la carrière que tu mènes ?
Jean-Jacques Goldman : Ouais, ouais.
Hervé Beaudis : Quelles sont les choses fondamentales qu'ils t'ont apprises ?
Jean-Jacques Goldman : Déjà, de pas juger en fonction de ce que les autres jugent, mais en fonction de nous-mêmes. Si quelqu'un arrive avec une grosse voiture, c'est pas forcément pour ça qu'il est important. De la même façon, quelqu'un qui n'a l'air de rien, faut lui donner sa chance aussi. (…) Et puis, le fait que rien n'est gagné. Le fait de bouffer à sa faim, c'est pas rien du tout. Le fait d'ouvrir le robinet et qu'il y ait de l'eau courante, c'est un grand privilège. Le fait de pouvoir voter, d'être libre, de lire un journal, de pouvoir dire ce qu'on veut, c'est un grand privilège.
Gilbert Jouin : Dans "Bonne idée", vous vous montrez en revanche très positif.
Jean-Jacques Goldman : Il faut toujours avoir en tête que nous sommes tous des vainqueurs puisqu'issus d'un spermatozoïde gagnant. J'évoque dans cette chanson le côté ensoleillé de la vie. J'y cite le rugby, Frédéric Dard et Johnny Winter, parce que ce sont pour moi trois bonnes raisons sur dix mille de vivre. Pour moi, le rugby est plus qu'un sport.
Gilbert Jouin : Vous y parlez également de fraternité, de tendresse, de filles à caresser... Quelle place tient la femme dans votre vie ?
Jean-Jacques Goldman : La femme est indispensable à notre équilibre. Mais depuis que j'ai appris que le mot "hystérique" venait d'"utérus", j'ai compris beaucoup de choses.
Jean-Jacques Goldman sait enfin dire "je t'aime"
Télé Magazine n° 2189, 24 octobre 1997
Carlos Sancho : Pour "Bonne idée", l'intro guitare possède quelques similitudes avec "Aïcha" de Khaled. Ne serait-ce pas déjà un début de manque d'inspiration ?
Jean-Jacques Goldman : Ce n'est pas un début, cela fait très longtemps que je répète que je tourne en rond sur le plan musical. Il existe aussi beaucoup d'autres titres dans cet album qui représentent des réminiscences d'autres choses.
Le retour au naturel
Guitarist n°96, novembre 1997
"Des vertiges à prendre, à comprendre et des filles à caresser / J'me suis dit / Bonne idée".
Jean-Jacques Goldman : Il faut prendre le texte au pied de la lettre. Les spaghetti, les mots de Frédéric Dard, Johnny Winter, le public, tout ça me fait penser qu'être né est une bonne idée. Le rugby aussi parce que c'est un sport où chacun a sa place. Il n'y a pas, comme au foot, de possibilité d'exploit. Les gros travaillent pour les petits et vice versa. Une entente parfaite entre eux est absolument nécessaire pour que l'équipe marche. C'est beaucoup plus qu'un sport dans ce sens-là. Mais j'ai oublié aussi beaucoup de choses, comme le café du matin ou la douche après le sport.
Erick Benzi : Au départ, j'ai fait un arrangement beaucoup plus orchestré. Cela n'a pas marché et nous sommes revenus à une dominante de guitare, comme sur la maquette, avec des habillages très légers. Je me suis régalé à faire une rythmique qui tourne, équilibrée, avec, pour la chaleur, la guitare qui guide bien la voix sans la faire trop rigide. C'est la plus gaie de l'album.
Paul Ferrette : Cette rythmique guitare est belle mais n'a pas l'air évidente du tout !
Erick Benzi : Cette rythmique de guitare a donné du mal à Jean-Jacques mais on a préféré que ce soit lui qui joue, pour l'ambiance. Ce n'est pas parfait, ce n'est pas approximatif non plus, c'est lui. C'est juste ce qu'il faut. Un autre guitariste nous l'aurait fait trop propre... trop parfaite. La guitare est mixée en mono, ce qui donne ce son très simple, très dépouillé. Comme lorsqu'on joue seul chez soi.
Paul Ferrette : Des arrangements simples… une voix très propre, très intimiste… On est loin de l'album "Rouge" !
Erick Benzi : Oui... c'est le retour d'un Jean-Jacques en solo. Un album que nous avons réalisé à deux. Très peu d'autres musiciens. Peu d'effets. Le contraire de "Rouge" où il y avait beaucoup de musiciens, beaucoup d'effets et un choeur. On est ici sur quelque chose de plus intimiste. Les traitements de voix ont donc été différents. Ainsi, nous avons vécu au studio enregistrant des voix le matin au réveil, avant le petit déjeuner pour avoir le petit "rugueux" du réveil, avant que la voix ne devienne trop lisse.
Livre de partitions de "En passant"
Hit Diffusion, juin 1998
Paul Ferrette : Cette chanson transpire une gaieté assez inattendue ?
Jean-Jacques Goldman : Ce thème du "bonheur de vivre", je le porte en moi depuis longtemps. Je le ressens profondément ; les plaisirs simples de la vie me rendent heureux et je crois que cette faculté de se réjouir de tout ne s'acquiert pas : on l'hérite de ses parents à la naissance ou par l'éducation peut-être. Mais elle n'a rien à voir avec la vie objective, la situation sociale, etc... Si quelqu'un est né avec le "mal de vivre", comme le dit Barbara, il n'y a rien à faire contre cet état. Je pense que l'on ne peut se raisonner. Si tu "es" malheureux, tu vis vraiment malheureux. Cet état de bonheur est évidemment une grande injustice, comme la beauté, l'intelligence, dont on hérite, ou pas. Et parfois, on est amené à le masquer sous peine de paraître presque obscène. Donc, merci d'abord à mes parents de m'avoir fait !
Paul Ferrette : Si je résume : deux types d'individus apparemment semblables mais finalement différents dans leurs réactions face à la vie.
Jean-Jacques Goldman : Oui, et face à un malheur, les premiers vont le vivre et rebondir sur autre chose et les seconds vont sombrer. Chaque malheur est alors un prétexte pour couler mais le bonheur n'a rien à voir. On n'a pas à les juger. Tous les actes quotidiens : courir, prendre une douche, faire l'amour, faire de la musique par exemple, me font hurler de bonheur. D'autres s'en tapent.
Livre de partitions de "En passant"
Hit Diffusion, juin 1998
Télémoustique : Tes textes sont souvent sans illusion mais ton discours est résolument optimiste. Par esprit de contradiction ?
Jean-Jacques Goldman : Bonne idée résume mon quotidien : je suis content d'être là. Mais au-delà d'être heureux ou triste, je suis vraiment optimiste. Peut-être qu'on ne va pas réussir, mais je suis sûr que les choses peuvent aller mieux.
Patrick Simonin : Il y a, dans le dernier album, une chanson dans laquelle vous citez les prénoms de vos parents : "Bonne idée". Bonne idée ont-ils eue de se rencontrer ces jours-là. Vous pensez souvent à eux ?
Jean-Jacques Goldman : Comme tout le monde. Peut-être un peu particulièrement parce que, disons, l'histoire et les périodes qu'ils ont traversées, n'étaient pas du tout normales, ne ressemblaient pas à d'autres.
Patrick Simonin : On peut dire que votre père est né dans le ghetto ?
Jean-Jacques Goldman : Il est né en Pologne, ma mère est née en Allemagne. Ils ont fui tous les deux ces pays-là. Ils se sont retrouvés en France et ils ont fait des petits Français.
Questions à Jean-Jacques Goldman
TV5, 20 novembre 1999
Jean-Jacques Goldman : Il y a un rapport [entre "La vie c'est mieux quand on est amoureux" et] la chanson "Bonne idée" sur le précédent album. La vie est super belle, que l'on soit ou non amoureux.
Jean-Jacques Goldman mène le bal !
Le Soir Magazine, le 14 décembre 2001
Raphaël Toledano : Dans votre précédent album "En passant", vous citiez le prénom de vos parents : Ruth et Moïshé. Vous avez dit de votre père qu'il est "l'homme qui vous a le plus impressionné". Quel héritage vous a-t-il laissé, lui qui fut une figure emblématique de la résistance juive à Lyon ?
Jean-Jacques Goldman : C'est justement - et là, on en revient à une précédente question - la foi en l'intelligence et la culture. Puisque lui a vécu le pire : il a été dans les conditions raciales, sociales, matérielles. les pires. Ses deux soeurs qui étaient institutrices sont mortes de faim en Pologne. Lui savait lire et écrire. Orphelin de père, il a été élevé par les intellectuels juifs et grâce à cela, il a pu traverser toutes les épreuves. Simplement grâce à ce bagage qui était l'appétit de culture et l'intelligence. Donc, peut-être, l'héritage qu'il m'a laissé, c'est celui-là.
Rencontre avec Jean-Jacques Goldman
L'Arche n° 535, septembre 2002
Géraldine Gauthier
Là-Bas, 30 octobre 1997
"Et rien vraiment ne change mais tout est différent
Comme des festins qu'on mange seul ou en les partageant"
(Bonne idée)
Manuella Nselel
En passant, 29 septembre 1999