Auteur : Jean-Jacques Goldman
Compositeur : Jean-Jacques Goldman
Editée par : Editions J.R.G.
Version originale
Année : 1997
Interprétée par : Jean-Jacques Goldman
Distribuée par : Columbia / Sony Music
On partira de nuit, l'heure où l'on doute
Que demain revienne encore
Loin des villes soumises, on suivra l'autoroute
Ensuite on perdra tous les nords
On laissera nos clés, nos cartes et nos codes
Prisons pour nous retenir
Tous ces gens qu'on voit vivre comme s'ils ignoraient
Qu'un jour il faudra mourir
Et qui se font surprendre au soir
Oh belle, on ira
On partira toi et moi, où ?, je sais pas
Y'a que les routes qui sont belles
Et peut importe oû elles nous mênent
Oh belle, on ira, on suivra les étoiles et les chercheurs d'or
Si on en trouve, on cherchera encore
On échappe à rien pas même à ses fuites
Quand on se pose on est mort
Oh j'ai tant obéi, si peu choisi petite
Et le temps perdu me dévore
On prendra les froids, les brûlures en face
On interdira les tiédeurs
Des fumées, des alcools et des calmants cuirasses
Qui nous ont volé nos douleurs
La vérité nous fera plus peur
Oh belle, on ira
On partira toi et moi, où ?, je sais pas
Y'a que des routes qui tremblent
Les destinations se ressemblent
Oh belle, tu verras
On suivra les étoiles et les chercheurs d'or
On s'arrêtera jamais dans les ports
Belle, on ira
Et l'ombre ne nous rattrapera peut-être pas
On ne changera pas le monde
Mais il nous changera pas
Ma belle, tiens mon bras
On sera des milliers dans ce cas, tu verras
Et même si tout est joué d'avance, on ira, on ira
Même si tout est joué d'avance
A côté de moi,
Tu sais y'a que les routes qui sont belles
Et crois-moi, on partira, tu verras
Si tu me crois, belle
Si tu me crois, belle
Un jour on partira
Si tu me crois, belle
Un jour
"On laissera / Tous ces gens qu'on voit vivre / Comme s'ils ignoraient / Qu'un jour il faudra mourir / Et qui se font surprendre au soir. / Oh belle, on ira, / On partira, toi et moi. Où ? Je sais pas. / Y'a que les routes qui sont belles"
Artist News : Le couple de la chanson partira-t-il un jour ou s'accroche-t-il à un rêve qui l'aide à avancer ?
Jean-Jacques Goldman : Je ne sais pas bien ! Au début le type est assez convaincant. Ses arguments sont clairs, déterminés. Mais bon, c'est un homme. Vers la fin, on le sent moins sûr de lui. Bon, et puis qu'elle se débrouille, c'est pas mes oignons.
Artist News : As-tu déjà fait ce genre de promesse et penses-tu l'(les) avoir tenue(s) ?
Jean-Jacques Goldman : Bof. J'ai jamais promis grand-chose. C'est plus facile à tenir !
Gaël : La chanson "On ira" fait penser à une phrase du romancier Milan Kundera qui dit, en substance, qu'il est complètement stupide et vain de penser que la vie est ailleurs.
Jean-Jacques Goldman : Il y a pire : penser que la vie est avec quelqu'un d'autre. C'est aussi une grande illusion. Ailleurs et avec quelqu'un d'autre. Les gens sont partout pareils et les destinations sont les mêmes. Mais c'est une jolie illusion de penser qu'il y a ailleurs. Cela permet d'avancer. C'est le grand Ouest, les chercheurs d'or.
Gaël : Si on va...
Jean-Jacques Goldman : Oui, mais même penser que l'on ira, cela peut soutenir. Tant que ça ne gâche pas le quotidien. Par contre, ce que l'on peut admettre, c'est qu'il faut rester sur la route. Cela ne sert à rien d'arriver. La clé est là. Ce n'est pas telle personne ou tel endroit qui est l'aboutissement mais c'est le fait d'y aller.
Jean-Jacques Goldman, flâneur sur la Terre
Gaël, 24 septembre 1997
Christophe Nicolas : Allez, on va terminer ce week-end spécial Jean-Jacques Goldman avec "On ira". Toujours cette envie de partir qu'on retrouve dans plusieurs chansons de vous, Jean- Jacques. Un jour, vous allez le faire. Qu'est-ce qu'on va devenir, nous ? [rires].
Jean-Jacques Goldman : Je vous emmène. [rires]
Christophe Nicolas : Eh bah dis donc ! Là-bas, où tout est neuf, tout est sauvage. c'est vrai que "On ira" on la compare un peu à "Là-bas", hein ? Je suis pas le premier à le faire. Sauf que, là, vous ne partez pas tout seul, en fait. est-ce que c'est une sorte de suite ? Est-ce que c'est une petite cousine de "Là-bas" ? Dans le thème abordé.
Jean-Jacques Goldman : Je pense plus qu'une chanson sur la personne que j'emmène, c'est une apologie des routes. Le fait de dire que le plus important n'est pas la destination. C'était valable aussi dans "Puisque tu pars" ou, un peu partout. enfin, sur pas mal de chansons c'est le fait de se dire que "peu importe d'où on vient et où on va." Même si on en garde des traces et la mémoire, mais le plus important c'est finalement la route pour aller d'un endroit à l'autre.
Christophe Nicolas : Je pensais à ce petit clin d'oeil à "Là-bas" parce que vous reprenez la phrase "Même si tout est joué d'avance". Evidemment, c'est volontaire. Mais il y a des phrases fétiches ou des mots fétiches, comme ça, qu'on retrouve dans certaines de vos chansons ?
Jean-Jacques Goldman : Certainement. J'ai pas fait une étude de texte très précise.
Christophe Nicolas : Là, c'est fait exprès ?
Jean-Jacques Goldman : Oui. C'est une référence à cette envie de partir. Et, puisque tout est joué d'avance, à forcer un peu le destin, quoi.
Week-end Jean-Jacques Goldman
Nostalgie, 26-27 septembre 1997
Jean-Jacques Goldman : Les destinations sont pas aussi importantes qu'on le croit. Arriver à quelque chose, c'est pas si important que ça. Le plus important, c'est d'y aller, c'est la route pour y aller.
Wit FM, 23 octobre 1997
Propos recueillis par Hervé Beaudis
TV Hebdo : "On interdira les tiédeurs" que vous chantez dans "On ira". Une maxime de vie ?
Jean-Jacques Goldman : Cela ne me concerne pas forcément, car je ne suis ni très courageux, ni très rebelle ! Mais c'est le signe d'une époque où l'on tiédit tout. Le summum est le Prozac, comme une façon de limiter les excès d'humeur... Les variations climatiques limitées à coup d'air conditionné dans les appartements, les voitures, les bureaux : petit à petit, on en vient à la tiédeur des sentiments. Dommage.
Jean-Jacques Goldman : "Je ne crois pas être inutile..."
TV Hebdo, 3 janvier 1998
"On n'échappe à rien pas même à ses fuites / Quand on se pose on est mort / Oh j'ai tant obéi, si peu choisi petite / Et le temps perdu me dévore".
Jean-Jacques Goldman : J'écris des chansons, j'en chante mais j'aurais pu rester dans mon magasin de sport et être heureux. Hier, j'ai déjeuné avec Philippe, un très très bon ami qui a repris le magasin et je trouve qu'il a une belle vie même s'il doit fermer à cause d'une grande surface qui s'installe juste à côté, il va changer de vie mais c'est une belle vie qui ne m'aurait pas fait peur. Pas du tout. Et je n'aurais pas été différent parce que ces réflexions qui mènent mes chansons ne datent pas d'aujourd'hui. Elles viennent de l'habitude familiale de discuter, de réfléchir et qui se poursuit encore le samedi midi chez ma mère. Ma soeur médecin, mon frère, producteur de tournée, ma belle-soeur, maintenant nos filles qui sont étudiantes en psycho ou en droit, tous les gens présents discutent, ça n'a rien à voir avec ce que je fais. Là où je ne suis pas le même, c'est par rapport à des expériences que j'ai pu vivre et qui sont très rares comme le détachement possible à l'argent, le fait d'être reconnu partout où je vais, de m'être présenté devant des milliers de personnes et de savoir communiquer avec elles. Ce sont des expériences que tout le monde ne partage pas. Mais elles me sont arrivées tard. J'avais déjà 32 ans, donc je n'ai pas l'impression d'avoir changé fondamentalement.
"On ne changera pas le monde / Mais il nous changera pas".
Jean-Jacques Goldman : La phrase est piquée, avec son autorisation au roman « Océan » d'Yves Simon. On parle assez peu de mes albums et de ses livres, mais il y a d'autres connivences entre nous. On se laisse quand même lire un peu de notre travail au fur et à mesure. Donc, le héros répond à un prof qui se moque de sa dissertation et lui dit d'une façon très ironique : Et alors monsieur, vous pensez changer le monde ? " II répond: "En tout cas, j'essaierai qu'il ne me change pas" et il sort de la classe. Je ne sais pas si c'est une phrase si profonde que cela. Elle vaut pour ce type qui se casse et qui pense que seules les routes sont belles. Ce gars-là n'est pas forcément moi. Je ne suis pas convaincu qu'on ne changera pas le monde et je ne suis pas convaincu que le monde ne nous changera pas non plus. L'antidote existe. On n'est pas tout seul. Il y a une espèce de courant, de professeurs, de gens normaux qui résistent. Les valeurs négatives et individualistes ne sont absolument pas les valeurs du monde. Il y en a plein d'autres.
Jean-Jacques Goldman : En fait, cette chanson a une histoire bizarre. J'avais fait, pour l'album, 11 ou 12 chansons. L'une des chansons rapides était un hommage au groupe STATUS QUO, avec reprise de beaucoup de leurs rythmes (je la ferai un jour). Elle parlait d'un type que j'ai rencontré dans un bar, vers 3 heures du matin, un jeune de quinze ans aide-cuisinier à Montauban monté spécialement pour un concert à Paris de STATUS QUO. Je trouvais cela fou. Ce jeune qui n'était même pas né lorsque le groupe était déjà connu, qui avait sans doute claqué sa paye pour venir au concert et qui, maintenant, là, attendait le premier train du matin pour rentrer chez lui. Finalement, je me suis rendu compte que cette chanson n'avait absolument pas sa place rythmiquement dans cet album.Il m'a donc manqué un titre rapide. A l'écoute des autres chansons, je me suis fait le portrait-robot de la chanson manquante. Il fallait qu'elle soit rapide, binaire, avec des guitares acoustiques, un peu dans l'esprit de "Je te donne". J'ai travaillé sur cette idée. C'est presque une chanson de commande, la pièce qui manquait pour finir mon puzzle. Et bizarrement, c'est une des chansons qui plaît le plus.
Paul Ferrette : Ça, c'est pour la musique, mais les paroles, les avais-tu déjà quelque part, dans un coin de ta tête, sur un papier ?
Jean-Jacques Goldman : Non, j'avais des phrases isolées comme "Tous ces gens qu'on voit vivre comme s'ils ignoraient qu'un jour il faudra mourir". Juste quelques phrases mais dans ce cas-là, c'est vraiment la musique qui induit un type de texte de route. C'est une musique qui parle de routes.
Paul Ferrette : Prendre ou "faire" la route, c'est aller ailleurs, vers quelqu'un ou quelque chose, c'est vivre des choses seul ou avec d'autres.
Jean-Jacques Goldman : Dans la vie, au départ, on veut obtenir des choses : avoir un diplôme, désirer une personne, un métier, une maison, etc... Ensuite, lorsque l'on a pris un peu d'âge, on se rend compte que le plus intéressant ce n'est pas ce que l'on obtient, c'est la route pour y arriver. Très souvent. C'est l'apologie des routes disant que c'est le chemin qui mène à l'endroit dont je rêvais, qui est important. C'est la route, elle-même qui est intéressante. C'est bon d'atteindre son but mais les souvenirs que l'on garde sont ceux que l'on a vécus pour y arriver. L'intérêt d'une vie, ce sont ces routes... pas les réussites.
Livre de partitions "En passant"
Hit Diffusion, juin 1998
Erick Benzi : Pas de doute pour cette chanson, c'est le type même de la Road Song. Il n'y a eu aucune ambiguïté sur la manière de la traiter : Autoroute - Highway. Genre Beach Boys. C'est une école qui nous est familière. On a fait 6 pistes de guitares acoustiques, six cordes et douze cordes : un mur de guitares. Il n'a pas fallu plus d'une journée pour tout mettre au point : basse, guitare, batterie, et un léger choeur vers la fin du titre. C'est le seul morceau où l'on a une véritable batterie. Bien faire sonner le saxophone nous a posé quelques difficultés du fait qu'il joue dans le registre suraigu. C'est le type de chanson que l'on écoute le matin et qui vous donne immédiatement la pêche. Facture classique mais elle a vraiment sa place dans l'album.
Livre de partitions de "En passant"
Hit Diffusion, juin 1998
Alain Pilot : Il y a une internaute - je suis allé sur des sites non- officiels de Jean-Jacques Goldman sur lesquels de nombreuses questions sont posées - qui demandait "Où c’est Là-bas?" et "Où c’est On ira" ?
Jean-Jacques Goldman : "On ira", "Y’a que les routes qui sont belles", donc peu importe, c’est dit dans la chanson, "Les destinations se ressemblent". L’histoire de "Là-bas", c’est une histoire bien spécifique que moi je voyais au Mexique, entre cet homme qui veut absolument passer la frontière, et cette femme qui dit que finalement, l’essentiel est là...
La bande passante
Radio France Internationale, 15 mars 2002